mardi 5 février 2008
Xiong You Cheng Zhu
Xiong you cheng zhu : identification
Lorsque j’ai demandé à Weiyi de me faire une calligraphie pour le mot « identification » elle m’a proposé l’expression « xiong you cheng zhu » : « avoir un bambou dans son cœur. »
J’ai immédiatement pensé aux vers de Shu Shi :
« Lorsque Yuke peignait un bambou…
Comme possédé, il délaissait son propre corps.
Celui-ci se transformait, devenait bambou. »
François Cheng nous explique que pour les peintres chinois « il s’agit d’aborder le sujet de l’intérieur – de devenir arbre, si l’on préfère. Ce qu’avait parfaitement compris Matisse qui aimait à répéter : « comme disent les Chinois qui veut dessiner un arbre doit savoir grandir avec lui. ».
Jean-François Billeter complète : « cette préoccupation contraste de manière frappante avec celle des peintres occidentaux de la Renaissance et des siècles suivants, qui ont au contraire fait porter tout leur effort sur la représentation du corps tel qu’on le voit de l’extérieur … ».
Stéphane Feuillas nous précise dans le numéro spécial du Point déjà cité que cette identification ne peut de faire qu’en s’abolissant comme individu et dans un oubli de soi.
Ces lectures croisées sur la recherche de l’identification poursuivie par les peintres chinois m’ont fait un peu l’effet de la madeleine. Elle m’ont rappelé un article que Claude Lévi-Strauss consacre à Jean-Jacques Rousseau et que l’on trouve dans le recueil « Anthropologie structurale II ». Jean-Jacques Rousseau à connu une fois dans sa vie une expérience de ce type qui le marquera toute sa vie. Après une chute suivie d’un évanouissement il reprend conscience « Il me semblait que je remplissais de ma légère existence tous les objet que j’apercevais …je n’avais nulle notion distincte de mon individu…je sentais dans tout mon être un calme ravissant auquel, chaque fois que je me le rappelle, je ne trouve rien de comparable dans toute l’activité des plaisirs connus. » A ce texte célèbre de la deuxième promenade, un passage de la septième fait écho… « Je sens des extases, des ravissements inexprimables à me fondre, pour ainsi dire, dans le système des êtres, à m’identifier avec la nature entière. ».
Et Lévi-Strauss poursuit en montrant combien cette identification est devenue difficile où que ce soit. Combien il est difficile de se « déprendre » pour retrouver « le clin d’œil alourdi de patience, de sérénité et de pardon réciproque, qu’une entente involontaire permet parfois d’échanger avec un chat. » Cette identification est pourtant « le vrai principe des sciences humaines et le seul fondement possible de la morale ». Elle fournit « le creuset où s’unissent le moi et l’autre, ma société et les autres sociétés, la nature et la culture, le sensible et le rationnel, l’humanité et la vie ».
Ainsi par delà les siècles et les distances des hommes nous invitent à réfléchir sur cette notion d’identification à la nature et au système des êtres.
Un peu plus haut, j'ai cité les dernières lignes de Tristes Tropiques. Vendredi soir, je regardais un reportage de Thalassa consacré aux îles Carteret, un petit archipel situé au large de la Papouasie. Ces îles sont en train d’être submergées par la mer en raison du réchauffement climatique. Dans 10 ou 15 ans elles n’existeront plus. Le reportage nous montrait une des dernières rentrées des classes. Comble de l’injustice, les quelques 3000 habitants qui vivent sur ces îles ont une des plus faibles empreintes écologiques au monde. Ils consomment un litre d’essence par mois pour faire tourner un petit générateur qui fournit l’électricité pour un spectacle qui réunit les habitants de l’archipel.
Vous pourrez voir des extraits de cet émouvant reportage en copiant le lien
http://www.thalassa.france3.fr/index-fr.php?page=emission&id_article=160
A suivre,
Jean-Louis
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1 commentaire:
le compteur du blog enregistre 36 visiteurs aujourd'hui, 36 des 4 coins du monde
tes articles ne doivent pas être étrangers à un tel succès
en effet tes articles sont toujours très construits et font référence non seulement à la peinture et à la musique mais également à la poésie, à la litterature française et bien sûr chinoise
quelle érudition ça me laisse sans voix
但是有问题
为什么用胸和不心
j'ai tout de même une question :
pourquoi avoir utilisé xiong et pas xin (coeur-esprit)?
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