dimanche 24 novembre 2013

Parés à virer ...faudrait pédaler ...



Confortablement installés dans la jolie Kangoo d’Anne, nous longeons la Sainte Victoire en observant les plaques de neige reste des dernières chutes. Après quelques hésitations sur le chemin à suivre nous arrivons à Pourcieux, but de notre voyage et point de départ de notre expédition en vélorail. Nous traversons les rues désertes du petit village. Comme nous sommes un peu en avance Anne et moi décidons d’aller boire un petit café dans un petit café tout droit sorti des années cinquante. Au fond de la salle un jukebox, dernière acquisition de l’établissement dans les années soixante.
Mais il nous faut bientôt affronter à nouveau le froid et rejoindre la voiture pour gagner l’aire de pique-nique lieu de notre rendez-vous. Nos amis arrivent. Nous sommes 45 ou 46, je n’ai pas compté. Un record, je crois, dans les annales des sorties chinafi. Nous avons de la chance. Il fait beau, un peu froid mais Eole, pourtant annoncé par la météo, est allé se promener ailleurs.

Le rendez-vous à la gare étant fixé à 12h30 pour un départ à 13h00, nous commençons exceptionnellement notre rencontre par le pique-nique. Francis ouvre les hostilités en débouchant plusieurs bouteilles de beaujolais, suivies bientôt de bouteilles de bordeaux et de rosé. Sur la table s’amoncellent les victuailles agrémentées de spécialités bretonnes grâce aux amis de Nicole. Comme vous pourrez le constater sur les photos nous avons affaire aujourd’hui à un véritable concours d’élégance. Certains sont coiffés de magnifiques chapkas, d'autres de bonnets de stroumpfs, une fashion lady nous montre ses gants hérissés de clous avec un sac gothique assorti. Mais voici que s’engage une partie de Jian zi entre Cui et plusieurs camarades. Chantal a apporté des papillotes garnies de pétards, avant goût des fêtes de Noël.
Et puis, vous vous en doutez, une sortie chinafi ne serait pas une sortie chinafi sans l’intervention de notre chorale qui s’en donne à cœur joie.Une mention spéciale pour Aïda qui voudrait bien intégrer notre chorale. Voyez comme elle s'applique à chanter.

Mais il est temps de rejoindre la petite gare de Pourcieux d’où vont partir les vélorails. Sur le quai nous faisons quelques photos. Voyez par exemple, celle réunissant notre chère doyenne, la maman de Nicole et la petite fille de Mahmoud âgée de deux mois. Eric, toujours soucieux du bien public, vérifie si le téléphone de campagne fonctionne bien. J’assiste ensuite à un déploiement stratégique consistant à choisir ceux qui semblent les meilleurs « pédaleurs » pour embarquer avec eux. Le sympathique chef de gare nous explique les consignes de sécurité et nous voilà partis. Le paysage est beau. Nous longeons des champs de vigne, traversons ponts et viaducs. En arrière-plan les contreforts enneigés des Alpes. Aux passages à niveau nous descendons consciencieusement pour soulever le fil barrant la voie. Nous nous engageons dans un passage encaissé entre des parois rocheuses annonçant le tunnel du Saint Pilon que nous franchissons en criant pour effrayer les fantômes. Anne fait quelques belles photos pour saisir le vélorail qui nous précède en ombres chinoises. Passé le tunnel commence une belle descente. Comme c’est agréable ! Que du plaisir nous avait dit le chef de gare. Pourtant une inquiétude commence à pointer dans nos esprits car une descente à l’aller c’est une montée au retour. Mais n’anticipons pas ! Voici la banlieue de Saint Maximin. Nous apercevons la petite ville et sa Basilique. Enfin nous arrivons au terminus. Le toujours sympathique chef de gare retourne les vélos et pose avec nous pour la photo de groupe.

Et alors commence la montée. Dur, dur. Je pédale avec Fabien. Mais nous nous relayons. Heureusement nous recevons le renfort de Yang Song dont l’enthousiasme fait plaisir à voir. La voilà qui entonne :
Parés à virer
Les gars faudrait pédaler
On se reposera quand on arrivera
A la gare de Pourcieux…
Que nous atteignons bientôt fourbus mais contents.

Mais la journée n’est pas finie. Nous partons pour visiter Saint Maximin. Une première halte au lavoir où Mireille, imitée par M. Gao, fait une démonstration du travail des lavandières. Elle nous montre le bassin de lavage et les deux bassins de rinçage. Nous longeons ensuite le couvent royal autrefois administré par les dominicains aujourd’hui converti en hôtel. Nous visitons le superbe cloître avant de nous diriger vers la Basilique Sainte Marie-Madeleine. Sur la place une plaque à la mémoire du comte de Provence Charles II qui décida, en 1295, de faire construire la Basilique, le plus important monument gothique de Provence. Nous pénétrons dans la nef majestueuse, pour aller jusqu’au maître autel et au chœur de style baroque. En nous retournant nous admirons le grand orgue du XVIII° siècle. Nous visitons la crypte qui contiendrait les reliques de la Sainte et qui renferme quatre beaux sarcophages.

Pendant la visite nous sommes assaillis par les questions de nos amis chinois qui montrent qu’ils sont aussi curieux de notre culture que nous de la leur.

Nous rentrons par la petite rue où se trouve toujours la plaque de la java de juju. Souvenir…

Voilà encore une belle sortie. Merci à tous ceux qui ont participé à son organisation et particulièrement à Françoise qui a d’autant plus de mérite qu’elle n’a pas pu participer à cette rencontre. Merci à tous pour votre bonne humeur.
Jean-Louis

lundi 18 novembre 2013

Chanson du Yunnan




Lorsque nos amis de la chorale (promotion 2012-2013) sont rentrés en Chine nous nous sommes promis de rester en contact. Ils tiennent leur promesse et nous recevons de temps en temps de leurs nouvelles. Hier, Ludivine nous a transmis une magnifique chanson. Je pense qu'il était important de vous la faire partager car elle permet de découvrir par la même occasion une interprète exceptionnelle que, pour ma part, je ne connaissais pas : Gong Linna.
Ludivine ne reculant devant aucun effort nous a transmis les paroles et même les partitions pour nos talentueux musiciens.
Merci Ludivine,
Jean-Louis


"Bonjour,
 
Aujourd'hui je vous propose la chanson "Le ruisseau clair coule". c'est un chant floklorique du Yunnan interprétée par Gong Linna, Une excellente chanteuse chinoise qui combine la musique floklorique et la musique moderne .(Son mari Robert Zollitsch est Allemand.Il est aussi un musicien )
Je vous également envoie la partition de musique de cette chanson.

Cordialement,
Ludivine

 
月亮出来亮汪汪  亮汪汪  
yue liang chu lai liang wang wang, liang wang wang 
想起我的阿哥在深山  
xiang qi wo de a ge zai shen shan
哥像月亮天上走  天上走  
ge xiang yue liang tian shang zou, tian shang zou  
哥啊哥啊哥啊   
ge a ge a ge a
山下小河淌水
shan xia xiao he tang shui
清悠悠
qing you you
 
月亮出来照半坡  照半坡   
yue liang chu lai zhao ban po, zhao ban po
望见月亮想起我阿哥  
wang jian yue liang xiang qi wo a ge  
一阵清风吹上坡  吹上坡   
yi zhen qing feng chui shang po, chui shang po
哥啊哥啊哥啊  
ge a ge a ge a 
你可听见阿妹 
ni ke ting jian a mei   
叫阿哥
jian a ge
 
La lune émerge, brillante, brillante.
Je pense à mon amoureux qui est au fond de la montagne.
Il marche au ciel comme la lune
 
La lune émerge, en éclairant la montagne.
Je pense à mon amoureux quand je regarde la lune.
Une légère brise passe.
Mon amoureux,mon amoureux,
Est-ce que tu m’entends ?
Je t ‘appelle dans mon cœur .
 

vendredi 15 novembre 2013

"Ailleurs, autrefois" versus "Ici, maintenant" ?


Françoise Héritier écrit qu’à l’origine de sa vocation d’ethnologue il y a certainement une préférence pour « l’ailleurs, autrefois » par rapport à « l’ici, maintenant ».
L’étude de cet « ailleurs, autrefois » qui peut sembler gratuit au premier abord ne l’est pas s’il peut fournir  des points de comparaison, des ressemblances, des écarts, des repères, des interrogations, un miroir permettant de mieux comprendre notre « ici, maintenant ». Pour comprendre, pour connaître ne faut-il pas des repères, des points de comparaison ? La grandeur, la vitesse, par exemple, ne peuvent s’apprécier que par rapport à une référence.

On se souvient que Joël Bellassen, dans sa conférence, parlait de cet ailleurs, de ce dépaysement, de cette distance offerts par la langue, l’écriture, la culture chinoises qui nous permettent d’interroger ce qui nous semble évident dans notre culture.
Le dernier livre de Françoise Héritier s'intitule "Le goût des mots". Il m'a semblé intéressant de le lire en le mettant en relation avec quelques éléments de culture chinoise.

Dès le titre, l'auteur introduit une correspondance entre les mots et les saveurs. Déjà Paul Claudel disait que les vers d'Aragon se sucent comme des bonbons. Comme le faisaient Rimbaud ou Baudelaire, Françoise Héritier montrent que ces correspondances peuvent s'étendre aux couleurs, aux sons, au toucher. Elles peuvent même concerner les valeurs morales et traduire la position d'une culture dans certains domaines.     

L'ethnologue évoque, par exemple, la notion de blanc associée dans notre culture à celle de pureté, de virginité. Elle détaille une série d’associations liées à la notion de blancheur qui dénotent une certaine attitude vis-à-vis de la sexualité :
-          propre versus sale
-          pur vs impur
-          limpide vs trouble
-          virginité vs exercice de la sexualité
-          transparent vs opaque. La vie d’une jeune fille pure est transparente. Un diamant pur diffracte la lumière sans ombre. Sinon il y a une impureté, un « crapaud » comme disent les joaillers. Un crapaud est sale et gluant. C’est l’antonyme de la princesse et du prince charmant de nos contes de fées.
Je me souviens, pour avoir, participer à des noces de villages dans l’Isère combien ces notions d’impureté, de « saleté » liées à la sexualité étaient présentes notamment à travers des rites scatologiques.

Or, on le sait, le blanc, en Chine, est la couleur du deuil. Il serait intéressant de savoir quelles associations d’idées conduisent à ce rapprochement, et d’une manière plus générale à quelles associations d’idées conduisent le fait de penser en chinois.

L’étudiante qui m’a transmis les pictogrammes de l’article précédant m’écrivait, dans des termes très beaux, très poétiques une chose fort intéressante : « la culture dongba est une sorte de nourriture ou de musique autour de moi. Je la connais sans en avoir conscience.  Je vis dans une société naxi. Ne pensez vous pas que la culture est quelque chose qui agit sur l’homme d’une manière invisible ? » On ne saurait mieux décrire l’action d’une culture sur ses membres et la nécessité de prendre du recul pour percevoir l’originalité de notions qui nous semblent naturelles et comme allant de soi parce qu'on les a assimilées avec l'air que l'on respire alors qu'elles sont le produit d'une éducation, d'une socialisation.
Plus loin, Françoise Héritier évoque le goût des enfants, des poètes, son propre goût pour donner créer un langage particulier, pour donner aux mots une acception différente de celle communément admise. Cela suppose de savoir conserver aux mots une certaine opacité, un certain secret à découvrir dans lesquels se glisse l’espace du jeu que l’on peut avoir avec eux. « Trop  de compréhension immédiate serait-il nuisible ? » nous dit Françoise Héritier. Il semble que la langue chinoise refuse ce « trop de compréhension immédiate » préférant conserver, comme nous l’a expliqué Joël Bellassen, un certain flou : un caractère ne renvoyant pas à un sens précis mais plutôt à une idée (voir compte rendu de la conférence).
Nous lisons certainement tous les livres à travers nos propres références. Il me semble que quelques éléments de culture chinoise offre un prisme de lecture particulièrement riche. N’est- ce pas une bonne raison de s’y intéresser ?
Jean-Louis

Françoise Héritier est professeur honoraire au Collège de France où elle a succédé  à Claude Lévi-Strauss. 


lundi 4 novembre 2013

Ecriture dongba

"Amour" en écriture dongba


Livre dongba

Les Naxi forment l'une des minorités chinoises. Au nombre d’environ 300 000, ils vivent aux confins du Yunnan, du Sichuan et du Tibet. Ils ont développé une culture très riche souvent appelée culture dongba (du nom de leurs prêtres) qui comporte des aspects religieux, une tradition littéraire et musicale, une langue et ce qui est plus rare une écriture.

L’écriture dongba est une écriture pictographique, probablement la dernière existante dans le monde. Elle comporte environ 2000 caractères permettant de transcrire certains aspects de la langue naxi.
Quelques pictogrammes m’ont été transmis par une étudiante en ethnologie de l’université de Kunming. Je trouve particulièrement sympathique le caractère signifiant « amour » que j’ai voulu vous faire partager.

Il est intéressant de noter que les Naxi de la région de Yongning ont une société matriarcale et matrilinéaire.

Seul un petit nombre de personnes peuvent encore comprendre cette écriture. La sauvegarde de ce patrimoine rare et non reproductible de l’humanité est devenu une priorité car comme l’écrivait Claude Lévi-Strauss : « les cultures indigènes se désintègrent plus vite que les corps radioactifs, et la lune, Mars et Vénus seront toujours à la même distance de la terre quand ce miroir que d’autres civilisations nous tendent se sera tellement éloigné de nos yeux qu’aucun instrument, si complexe et coûteux soit-il, dont nous pourrions disposer, ne nous permettra plus d’inspecter ni même d’apercevoir cette image de nous-mêmes, pour un temps offerte à notre regard et qui nous aura fuis à jamais. »
Jean-Louis