dimanche 3 février 2008

Mo hu




Mo hu, l'indistinction

La brume envahit très souvent les paysages des peintures chinoises.
Pourquoi ?
La brume est un symbole qui nous permet de retrouver plusieurs notions apparues dans les articles précédents.
François Cheng précise : « la brume, personnification quasi palpable du Vide où toutes choses ont leur source est un élément essentiel du paysage classique. »
Mais la brume ne sépare pas au contraire elle est un trait d’union entre les différents éléments du paysage. : « nuages et eaux se rejoignent enfantés par le même principe d’indistinction…la brume vide caresse du même doigt complice l’auvent où goutte la pluie et la montagne céleste. »
Cette prédilection des peintres chinois pour la représentation de la brume est à mettre en relation avec une pensée qui privilégie « la valeur allusive », les symboles aux définitions claires et précises. Une pensée où tout est en relation avec tout, où un mouvement perpétuel anime la totalité des choses.
François Jullien : la peinture chinoise vise à représenter « non pas un état défini et tranché des choses, mais le passage d’un état à un autre…la peinture chinoise peint la trans-formation. Elle peint l’effet de vague et de flou…qui va de pair avec la mutation. Or tout est toujours en mutation. Tandis que la pensée grecque valorise le formé et le distinct, d’où son culte de la Forme définitive qu’exemplifie le Nu, la Chine pense –figure- le transitionnel. Car la pensée grecque …accordant tout le crédit à la clarté nous a laissés étrangement démunis à cet égard : penser (figurer) l’indistinct de la transition. C’est pourquoi la Chine a privilégié la figuration des bambous et des rochers, des vagues et des brouillards, et non pas du nu ».

Passage d’un état à un autre, passage du moi à l’autre : le principe d’indistinction mène au principe d’identification.
Dans un prochain article, je vous ferai partager des extraits de la deuxième et de la septième promenade où Jean-Jacques Rousseau décrit comment il a vécu ce passage et comment cette expérience a marqué toute sa vie.
Lorsque j’ai demandé à Weiyi de me calligraphier le mot « identification », j’ai eu une belle surprise…

A suivre,
Jean-Louis

1 commentaire:

Anonyme a dit…

模糊 : MO HU peut également se traduire par flou ou vague.

ton explication sur le refus du nu en Chine n'est plus d'actualité quand on considère la peinture chinoise contemporaine qui lui accorde au contraire une grande place!
mais bien sûr quand on se replace dans le temps c'est OK

j'ai beaucoup aimé la notion de brume comme trait d'union, c'est très poétique

tu nous laisses sur notre faim on attend la suite sur l'identification

à très bientôt donc!