lundi 18 février 2008

tao ye



Tao ye : Perfectionnement

Il n’est pas un ouvrage traitant des arts chinois (calligraphie, poésie, peinture, musique) qui n’insistent sur le fait qu’ils sont « une méthode de perfectionnement de soi tout autant qu’un moyen d’expression. » Billeter.
Ainsi l’art pictural chinois, nous dit François Cheng, est « une école de vie, un exercice de réalisation intime…il s’agit comme toujours d’aider l’âme à monter. »
Ce désir de perfectionnement est souvent représenté par l’image du sage qui gravit la montagne ou par la contemplation des lointains qui nous font prendre conscience que « le monde et l’homme adviennent l’un par l’autre. »
Yolaine Escande précise : « l’essentiel n’est pas le but mais le parcours, le cheminement ; c’est pourquoi les lointains ou les distances à parcourir occupent une pace si importante dans la théorie et la composition picturale. »
« Aller me suffit » écrivait René Char. Aller au bout de soi, donner tout ce que l’on a en soi malgré les difficultés et les embûches du chemin. C’est ce que nous dit le très beau poème de Li Shangyin :
« …La bougie ne tarit ses pleurs
que brûlée et réduite en cendres.
Dans le miroir du matin pâlissent
Les nuages de la chevelure.
Au chant de la nuit répond l’écho
Fraîchi sous la clarté lunaire.
D’ici jusqu’au mont Peng
La route n’est pas si longue.
Diligent Oiseau vert,
Veille sur nos traversées ! »

Gravir la montagne pour accéder au lointain, « désir d’abolir les horizons, d’accéder coûte que coûte au lointain comme Schumann en musique…Peinture et musique à cette altitude ne se peuvent plus distinguer l’une de l’autre… »

A suivre,
Jean-Louis

Shitao L'instant de partir, gravir la montagne


Shitao Dernière randonnée, observer les lointains


Robert Schumann : concerto pour piano écrit pour sa femme Clara

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Nicole, je viens d'effacer le commentaire suspect qui menait peut être à une page diffusant un virus...

Anonyme a dit…

你好
谢谢

BRAVO
Effectivement ce "commentaire" était des plus suspects...

Quant au texte d'origine intitulé "perfectionnement" ,il est complet : musique, peintures, et poésie
(et qui + est pas n'importe quelle poésie),
j'apprécie vraiment mais quel est donc cet oiseau vert?

Quant au sage qui gravit la montagne il me fait penser à notre cher Jean Pierre au Garlaban, il a été parfait!
l'essentiel n'étant pas le but mais le parcours

c'est sympa...
Toutefois c'est très éloigné du monde du travail (je pense à la grande distribution ...) où le résultat seul compte quant aux moyens peu importe :
IL FAUT QUE LE RESULTAT SOIT ATTEINT...

Je suis satisfaite d'avoir quitté un tel univers

Encore merci JL et on attend bien sûr la suite

Anonyme a dit…

Jullien nous dit que "la pensée chinoise est celle qui s'exprime en chinois", c'est pourquoi, j'ai cherché dans le dictionnaire la signification de 陶冶, et j'y ai trouvé les deux sens suivants :
1. façonner et fondre / modeler
2. éduquer / former / cultiver / exercer une influence saine sur le caractère de qn / façonner la personnalité de qn.
(Dico en ligne Chine-nouvelle)

Ces définitions me semblent assez éloignées de la notion de perfectionnement telle que je me l'imaginais. Est ce la bonne traduction ou est ce vraiment une autre vision du perfectionnement ?

Olivier

Anonyme a dit…

Lorsque je demande à Weiyi de calligraphier un caractère qui servira d’illustration à un futur message nous regardons ensemble sur son petit dictionnaire électronique.
Je voulais écrire un article pour développer ce que JF Billeter exprime dans la première citation : les arts chinois sont « une méthode de perfectionnement de soi tout autant qu’un moyen d’expression. »
Lorsque nous avons introduit le mot perfectionnement, le dictionnaire de Weiyi nous a proposé plusieurs caractères et notamment Tao Ye. Weiyi m’a commenté plus précisément la signification de Tao Ye, elle m’a bien expliqué les différentes significations :
1. façonner et fondre / modeler
2. éduquer / former / cultiver / exercer une influence saine sur le caractère de qn / façonner la personnalité de qn.

Cela m’a paru convenir. Stéphane Feuillas précise que deux expressions servent à traduire en chinois cette « culture de soi », cette méthode de perfectionnement de soi que sont les arts chinois :
- « raffiner le corps » (xiu shen)
- « nourrir la vie » (yang sheng »
A noter que le dictionnaire des synonymes donne « raffinement » comme un des synonymes de « perfectionnement ».

Billeter, Li Zhonggyao et Li Xiaohong rappellent que selon la tradition les arts chinois ont une influence heureuse sur le caractère et la santé de l’artiste.

Le mot perfectionnement contenant également la notion d’amélioration, d’élévation, de cheminement vers le haut me parait convenir au sujet du message.

Cela dit, je suis bien conscient que mes articles peuvent contenir des erreurs et des approximations. Mais je ne crois pas que ce soit très grave. Je constate que les messages du blog suscitent des recherches, des discussions, des réflexions. Cela me parait être l’essentiel.
Jean-Louis

Anonyme a dit…

Cher Jean Louis,

La notion de perfectionnement telle qu'elle est développée dans ton message me semble plutôt de nature réflexive alors que sa traduction en chinois par "taoye" est plutôt de nature transistive.

Comme tu le dis "yang sheng" et "xiu shen" traduisent peut être mieux le perfectionnement de soi.

Le débat entre Billeter et Jullien a commencé au niveau de différences d'interprétations au niveau de la traduction. Je pense avec eux que tout commence là.

Merci en tout cas de tes précisions.

Olivier

Anonyme a dit…

Cher Olivier
J’espère, en tout cas, qu’il n’y aura jamais entre nous de polémiques et de répliques, mais seulement des échanges et des réponses.
Il y a environ un an je soumettais un travail sur le Rêve dans le Pavillon Rouge à quelqu’un qui me répondit : « si vous voulez être lu par les sinologues ne citez pas François Jullien car il pratique la confusion des genres. » Pourquoi ces anathèmes et cette censure chez une personne qui j’en suis sûr prône la liberté d’expression.
Il y a une expression de Montaigne que j’aime beaucoup c’est « je fais mon miel de toutes fleurs.» Pourquoi ne pas « butiner » un peu JF Billeter, un peu F. Jullien. Ils ont tous les deux des choses à nous dire qui nous enrichissent.
Peut-être je demanderai un jour à Weiyi de traduire en chinois la phrase de Montaigne. Ce sera, bien sûr, difficile. Nous essayons de prendre beaucoup de soin dans nos traductions et cela peut prendre, parfois, plusieurs séances. Ainsi j’ai demandé à Weiyi de traduire la notion de « détour » utilisée par François Jullien. Nous n’avons pas encore abouti. Weiyi doit demander à d’autres étudiants pour cerner au mieux l’idée.
Bien sûr quand j’écris mes articles je me pose la question de l’erreur, de l’approximation que ce soit dans la traduction ou dans l’expression des idées. Mais encore une fois, je ne crois pas que ce soit très grave de se tromper. Sinon nous ne nous lancerions jamais dans une entreprise comme la nôtre. Plus que le message, je pense que ce qui est important c’est la réponse qui le fait vivre et permet de le préciser. Plutôt que d’erreurs il vaut peut-être mieux parler de stades de compréhension appeler à être dépassés, complétés par nos échanges.
Amitiés,
Jean-Louis

Anonyme a dit…

Cher Jean Louis,

Je suis 100% d'accord avec toi.

Ne prends pas mes remarques pour des critiques mais pour un essai d'approfondissement.

J'essaie de profiter de tes messages pour approfondir (quand je le peux) le caractère chinois proposé en tête de message : sa calligraphie bien sûr et sur ce point félicitations à WeiYi, mais aussi les clés qui le compose, ses sens premiers, ses sens dérivés etc...

L'approche de la culture chinoise ne passe-t-elle pas aussi par là ?

Olivier