lundi 25 avril 2011

Le naturel ou comment traduire le souffle vital en peinture


Chen Hongshou (1599-1652), Les quatre joies de Nan Shenglu

Dans les précédents billets nous avons vu que la recherche du Beau et la perspective linéaire qui occupent une place centrale dans l’esthétique européenne à partir de la Renaissance reflétent un certain état des sciences (géométrie, anatomie) et de la philosophie (cogito cartésien). Or la Chine n’a pas placé le Beau au cœur de son esthétique mais le Naturel. Qu’est ce que cela signifie ? Quelle conception du monde ce choix révèle t-il ?

Yolaine Escande nous dit qu’en chinois, il existe deux expressions pour dire nature, naturel : ziran et tianran. Ziran signifie ce qui est ainsi, non au sens de ce qui est en soi, mais d’un dynamisme à l’œuvre par lui-même ; ziran est parfois traduit par ainséïté (voir article sur Claude Lévi-Strauss au Japon) au sens de ce qui se réalise de soi-même.

Cette notion est essentielle dans la conception chinoise du monde. Celui-ci n’est pas conçu comme l’œuvre d’un Dieu extérieur à sa création mais, nous dit Anne Cheng, « comme allant de soi-même ainsi, suivant un processus de transformation… Ce que la pensée chinoise perçoit comme premier est la mutation, ressort du dynamisme universel qu’est le souffle vital…Le souffle est un, mais pas d’une unité compacte, statique et figée. Vital, il est au contraire en circulation permanente, il est par essence mutation ».

C’est ce dynamisme à l’œuvre par lui-même, ce processus de transformation, cette circulation permanente du souffle, cette mutation, ce passage du « il n’y a pas » au « il y a », du virtuel au manifeste, de l’indifférencié au différencié que c’est efforcé de rendre l’art chinois.

L’art chinois ne pouvait représenter ce dynamisme, ce processus de transformation, cette circulation permanente du souffle dans la forme figée, fixe, arrêtée que suppose le Nu. Lorsqu’il représente un personnage, l’art chinois préfère le couvrir « de vêtements flottant alentour lui redonnant déjà du mouvant » (François Jullien). Jean-François Billeter nous donne un exemple de ce procédé à partir d’une série de tableaux de Chen Hongshu (1599-1652). Dans le tableau que nous avons choisi en illustration de cet article « le corps n’est pas représenté mais seulement signifié par le visage et la pointe d’une chaussure…le drapé n’a pas du tout la même fonction que celui du Caravage (voir billet précédent). Tandis que les étoffes du Bacchus sont soumises à la loi de la pesanteur…celles de Chen Hongshou sont animées de forces qui circulent et tourbillonnent sans cause apparente. »

Mais les mouvements du costume n’offrant que des possibilités limitées, les peintres chinois ont inventé d’autres moyens de visualiser la circulation du souffle, le processus de transformation à l’œuvre dans l’univers. Le principal a été le paysage.


Montagne au printemps, attribué à Yang Weizhen (1296-1370)

Jean-François Billeter nous propose l’analyse d’une peinture de paysage Montagne au Printemps. Il fait remarquer « qu’un pas de plus est franchi dans la dissolution de l’objet », nous sommes loin de la tradition picturale de la Renaissance « qui s’est éprise de l’objet, en particulier du corps objet… ». « Les eaux, les arbres, les roches ne sont plus que des figures en train de s’abolir dans la lumière…Les masses …sont réduites à des signes tourbillonnants, en passe de se résorber dans l’énergie pure ».

Comme le souligne François Jullien une telle tradition picturale « peint, non la forme arrêtée, mais le monde accédant à la forme ou revenant à son fonds indifférencié. ». Elle peint non la forme mais la formation, la transformation.

Dans cette perspective nous dit Yolaine Escande, le geste du peintre est «une participation au dynamisme, à l’autogenèse sans cesse renouvelée du cosmos ». Ce prolongement du dynamisme de l’univers ne peut s’obtenir qu’en « l’absence de mise en avant du soi », qu’à condition de bannir « la volonté d’imposer son moi ou même d’en avoir conscience ». Alors, remarque Nicole Vandier-Nicolas, l’artiste pourra restituer « le mystère de la création, changeante et mouvante qui ne peut pas se dépeindre par les formes ».

Pour terminer ce billet et ménager une transition avec le suivant remarquons avec Jean-François Billeter, l’inscription calligraphiée en haut du tableau qui nous montre l’affinité qui lie en Chine le signe pictural et le signe calligraphique », et d’une manière plus générale l’affinité qui lie la poésie et la peinture.
Jean-Louis

Bibliographie :
- Anne Cheng, Histoire de la pensée chinoise, Seuil, Points, Essais
- Jean-François Billeter, L’art chinois de l’écriture, Skira
- François Jullien, Le Nu impossible, Points Essais
- Yolaine Escande, L’art en Chine, Hermann
- Yolaine Escande, La culture du Shanshui, Hermann
- Nicole Vandier-Nicolas, Peinture chinoise et tradition lettrée, Seuil

samedi 23 avril 2011

Une soirée mémorable


Quelle joie de partager ces mets succulents avec nos amis !!!
De tels moments sont exceptionnels, merci à Jie, Wen Jie, Rui Xin et Trois Pierres!!!

Nicole

jeudi 21 avril 2011

Le Nu impossible


Représentation occidentale et chinoise du corps humain : à gauche Léonard de Vinci, Anatomie comparée, vers 1506-1508 ; à droite, planche du Leijing de Zhang Jiebin, 1624 représentant l’un des méridiens par où circule l’énergie.

Continuons notre exploration du Beau qui, nous l’avons vu dans l’article précédant, s’est particulièrement incarné dans le Nu. Cette exploration nous permettra de comprendre pourquoi la figuration du Nu fut impossible en Chine.

Le Beau, le Nu et la perspective linéaire, choix esthétiques apparus ou réapparus sous la Renaissance ont trois points communs.
- Ils ont partie liée aux mesures, aux nombres, aux mathématiques, à la géométrie,
- Ils offrent une représentation fixe, arrêtée, figée de l’objet de la peinture ou de la sculpture.
- Ils postulent un dédoublement du sujet regardant et de l’objet représenté.
Examinons plus en détail ces trois points, nous pourrons mieux comprendre, par contraste, les choix esthétiques de la Chine.

1°) Le Beau, le Nu, la perspective linéaire ont partie liée avec les mathématiques et la géométrie :
Jean-François Billeter : « Les marchands de la Renaissance faisaient grand usage de calculs de volumes dans leur métier, ils étaient amateurs de géométrie et souhaitaient la retrouver dans les tableaux qu’ils commanditaient ».
François Jullien : « La Beauté arrive peu à peu, à travers bien des nombres…Aussi voit-on, Alberti et Léonard aborder le nu au moyen de rapporteurs et de compas… »

2° Le Beau, le Nu, la perspective linéaire offrent une représentation fixe, arrêtée, figée de l’objet de la peinture ou de la sculpture


Le Caravage, Bacchus, vers 1589
Jean-François Billeter analysant le Bacchus du Caravage : « Il (Bacchus) rêve, l’œil fixé dans le vide, mais il exécute un geste ; ce geste semble arrêté, oublié, irréel…Le jeune homme pose, il a suspendu son activité pour s’offrir au regard. Cela l’enferme dans une passivité qui s’accorde mal avec son physique, avec son accoutrement, avec le vin et les fruits disposés devant lui. Le regard du peintre a arrêté la réalité pour mieux l’objectiver… »

François Jullien : « Pour sonder plus avant ce qui lie le nu à une forme définitive, revenons-en à ce qui est au départ du nu : c’est la pose qui fait le nu…Pour que s’opère la synthèse esthétique, il y faut une fixité, la beauté se découvrant seulement par arrêt, suspendant le temps, sur fond d’éternité. Comme un rêve de pierre…disait Baudelaire ».

3°) Le Beau, le Nu, la perspective linéaire postulent un dédoublement du sujet regardant et de l’objet représenté.
Jean-François Billeter : « Le Caravage a agi …comme s’il avait voulu dépeindre non ce que le regard saisit, mais ce que la réalité est en dehors de lui objectivement. Le jeune homme est installé dans un espace qui est censé exister indépendamment du spectateur. Cet effet résulte de l’usage de la perspective (notons le raccourci des avant-bras) … ».

François Jullien : L’artiste qui figure un nu ne veut pas représenter les émotions, la subjectivité de son modèle. « faire poser, c’est conférer à ce qui pose un pur statut d’objet, en le coupant de la subjectivité qui l’appréhende et le considérant selon les seules lois de la perception…Le nu est le corps objectivé par excellence.
Comme l’a montré Augustin Berque c’est ce dédoublement entre le sujet et l’objet qui a rendu possible l’objectivation scientifique et qui s’est traduit sur le plan philosophique par le cogito cartésien.

Cette objectivation du corps a eu une incidence sur la médecine(voir illustration proposée en tête de l'article).
Jean-François Billeter : « La médecine occidentale s’est constituée en discipline scientifique grâce à la dissection, à l’expérimentation chimique et à d’autres méthodes exactes » Rien ne montre mieux la différence de nature entre la médecine occidentale et la médecine chinoise « que les représentations qu’elles donnent de l’intérieur du corps humain : d’un côté des os, des muscles des nerfs, des vaisseaux et d’autres organes assemblées comme une mécanique, de l’autre des circuits d’énergie sensible ». La médecine occidentale ayant affaire à un objet a privilégié l’intervention extérieure principalement chirurgicale ou pharmaceutique ; la médecine chinoise sans négligé l’action extérieure a « toujours privilégié l’action intérieure que le sujet exerce par son activité sur son activité. La médecine occidentale est fondé sur le rapport à l’objet, la médecine chinoise sur un rapport à soi qui donne prise sur soi ».

François Jullien : Les Chinois « prêtent moins d’attention à l’identité ainsi qu’à la spécificité des composants morphologiques (organes, muscles, tendons, ligaments, etc.) qu’à la qualité des échanges qui s’opèrent entre le « dehors » et le « dedans » et assure au corps entier sa vitalité. »

Ces différences de conceptions allaient se refléter dans les choix esthétiques. Du côté occidental, l’intérêt pour l’anatomie et la dissection allaient permettre la représentation du Nu. Du côté chinois, le désintérêt pour ces deux disciplines allaient rendre la représentation du Nu « impossible ». Par contre le fait de privilégier l’étude de la circulation de l’énergie allaient se traduire par d’autres choix esthétiques, particulièrement illustrés par le gente xie yi. C’est ce que je développerai dans un prochain article.
Jean-Louis

Bibliographie :
Jean-François Billeter, L’art chinois de l’écriture, Skira, 1989
François Jullien, Le Nu impossible, Seuil, 2000
Augustin Berque, Les raisons du paysage, Hazan, 1995

lundi 18 avril 2011

Quel succès !



Les randonnées Chinafi victimes de leur succès ? En fait, Nicole et moi nous avons eu un peu peur car, en début de matinée, il y avait plus de participants que de places dans les voitures pour les accueillir. Mais heureusement, avec Chinafi, tout finit par s’arranger. Merci à Thierry, venu à la rescousse en dernière minute, qui permit à tous nos amis de participer à la randonnée.
Nous pouvons tirer une leçon encourageante de cette petite frayeur : c’est que de plus en plus de Chinois participent à nos sorties. Il faut dire qu’elles en valent la peine, témoin celle de ce dimanche à Saint Rémy.

Tout y était ! Les ruines romaines des Antiques et de Glanum. Une superbe randonnée dans les Alpilles sous un soleil éclatant. Les arbres de Judée et les champs couverts de fleurs. Les rires et les chansons des participants. Nous avons, par exemple chanté « Papillon », une chanson française que je ne connaissais pas mais qui est, parait-il, très connue en Chine :
« Le Diable et le Bon Dieu, pourquoi ?
C’est pour faire parler les curieux »

Nous avons terminé par ce qui fut le couronnement de la journée : la visite de Saint Paul de Mausolé où nous avons pu voir :
- La chambre de Van Gogh
- Les champs de Van Gogh
- Le cloitre roman et le monastère de Saint Paul. Dans la petite église, une de nos amies chanta trois chants tibétains. Ce fut très émouvant.

On comprend que la beauté des lieux et des paysages environnants aient pu inspirer, en l’espace d’un an, à Van Gogh 150 dessins et 143 huiles dont la fameuse « nuit étoilée » et la « chambre de Vincent à Arles ».

Une mention spéciale pour la petite Pang Pang (7 ans) qui fit l’excursion sans se faire porter.

Un grand merci à Danielle et à Alain pour leur gentillesse et leur conduite attentionnée. Un grand merci à Nicole pour l’organisation.

Et maintenant préparons nous pour la soirée du 30 avril chez Anne. Une soirée qui promet d’être pleine de surprises.
Jean-Louis

jeudi 14 avril 2011

La conférence sur la céramique chinoise est reportée

Dernière minute. L'association Yin nous communique que la conférence sur la céramique chinoise qui devait avoir lieu le 15 avril est reportée à une date ultérieure, Corine Nouvel étant indisponible ce jour là.
Jean-Louis

Le Beau, le Naturel


Léonard de Vinci, l’Homme de Vitruve, 1490, dessin à la plume

Jean-François Billeter le disait déjà : c’est à tort que l’on appelle l’art chinois de l’écriture calligraphie. En effet celui-ci ne vise pas, ne vise pas d’abord à la belle écriture. Son idéal voudrait que les caractères paraissent aussi naturels que les traces de gouttières sur un mur ou d’insectes rongeant le bois.

Yolaine Escande et François Jullien nous le rappellent la recherche du Beau n’a pas été un idéal de l’art lettré qui, dans ses différentes branches (peinture, poésie, calligraphie) s’est fixé comme but : le Naturel. Qu’est ce que cela signifie ?

Il est intéressant de rapprocher ces deux notions, le Beau et le Naturel, pour mieux les définir.

Dans les livres traitant de l’esthétique, le Beau est souvent défini par les qualités de juste mesure, d’équilibre, d’harmonie. Le Beau s’incarne le mieux dans la beauté corporelle et plus particulièrement dans le Nu où il passe d’abord, aux yeux des peintres, à partir du XV° siècle, par le respect de normes de proportions censées assurer la « symétrie » (au sens ancien d’harmonie de la figure). Un rapport de dimensions regardé comme parfait doit exister entre la mesure de la tête et la hauteur totale de la figure, sa largeur et les différentes parties du corps.
La représentation du Nu et l’idéal de beauté qu’il incarne qui fut au centre de l’art grec est réapparu sous la Renaissance à peu près en même temps que l’on découvrait cette autre « invention » de l’esthétique de la Renaissance qu’est la perspective linéaire.

Or, le Nu, le Beau et la perspective linéaire ont trois points communs :
- Ils ont partie liée aux mesures, aux nombres, aux mathématiques, à la géométrie,
- Ils offrent une représentation fixe, arrêtée, figée de l’objet de la peinture ou de la sculpture.
- Ils postulent un dédoublement du sujet regardant et de l’objet représenté.

Ces trois points communs sont le reflet d’un bouleversement qu’ont connu les sciences et la philosophie européenne à partir de la Renaissance.

Ce bouleversement, nous dit Augustin Berque « s’est institué en paradigme au XVII° siècle : le paradigme occidental de la modernité. On peut illustrer ce paradigme par quatre noms : Bacon (la méthode expérimentale), Galilée (la confirmation du décentrement cosmologique anticipé par Copernic), Descartes (le dualisme sujet-objet) et Newton (l’espace homogène, isotrope, infini, autrement dit absolu). Pour le réduire à un principe, il s’agit de la découverte du monde physique en tant que tel ; autrement dit, le monde de la chose en soi, découplé de la subjectivité humaine. Cette découverte révolutionnaire qui allait engendrer les sciences et les techniques modernes introduisait du même coup une fracture inouïe dans l’histoire de l’humanité. Désormais le monde physique celui de la réalité intrinsèque des choses (le monde où la Terre tourne autour du Soleil) était posé indépendamment du monde phénoménal – celui de la réalité de ces mêmes choses pour l’homme (le monde où le Soleil tourne autour de la Terre).»

La Chine n’a pas suivie cette voie. Elle a exploré d’autres chemins. Son art, son esthétique avec la recherche du Naturel en sont le reflet. Nous verrons, par exemple, comment la médecine chinoise ayant peu pratiqué l’anatomie, l’art chinois s’est trouvé devant l’impossibilité ou la difficulté à figurer le Nu.

Tout cela demande quelques développements que je vous propose d’aborder dans de prochains articles.
Jean-Louis

Bibliographie :
- Jean-François Billeter, L’art chinois de l’écriture, Skira
- François Jullien, Le Nu impossible, Points Essais
- Yolaine Escande, L’art en Chine, Hermann
- Yolaine Escande, La culture du Shanshui, Hermann
- Augustin Berque, Les raisons du Paysage, Hazan
- Nadeije Laneyrie-Dagen, Lire la peinture, Larousse.

lundi 11 avril 2011

Dimanche : tous à St Rémy

C'est Danielle et Alain qui nous proposent un programme complet : culture et sport.

Culture avec la visite de sites prestigieux tels les Antiques ou encore Glanum mais aussi le monastère St Paul de Mausole maison de santé psychiatrique ayant accueilli Van Gogh
- cloître , chapelle : gratuit
- possibilité de visite du musée entrée 4€ et 3€ groupe à partir de 10 personnes :chambre de l'artiste, techniques de soin de l'époque.
Voici une photo du cloître :



Sport avec une randonnée légère, sans difficulté, dénivelé 250 m , durée 3h30 sans les arrêts.
pique-nique après 2h de marche.

Quel programme !!!

Alors rendez vous à 10h 30 sur le Parking devant la maison de santé de St Paul de Mausole qui accueille toujours des malades aujourd'hui
adresse : route des Baux 13532 St Rémy de Provence tel 04 90 92 77 00
ou au métro La Rose à Marseille à 8h30
ou à l'office du tourisme d'Aix à 9h00

A dimanche (avec bien sûr le pique nique)

Nicole

samedi 9 avril 2011

Conférence sur la céramique chinoise



L'assocation Yin organise une conférence :

Le 15 avril à partir de 17h30

La Céramique chinoise
Conférence de Corinne NOUVEL

Participation : 10 euros ; Gratuit pour les adhérents

Et, pour ceux qui souhaiteraient prolonger la soirée : Dîner sur réservation : 12 euros

Lieu : La Chimère , 409, CD. 10, 13100 Saint-Marc Jaumegarde

( C.D. 10 , Terminus Aix en Bus ligne 4B, Arrêt Domaine du Prignon)

Tél : 06 81 80 87 92 E-Mail : associationyin@yahoo.fr

Jean-Louis

mercredi 6 avril 2011

Tous à St Rémy le 17 avril

Le programme nous est proposé par Danielle et Alain.

Il s'agit d'une randonnée légère, sans difficulté, le dénivelé n'étant que de 250m.
Nous aurons le plaisir d'admirer les Antiques :



Nous longerons également les ruines gallo romaines de Glanum.

Nous visiterons également le monastère St Paul de Mausole maison psychiatrique ayant acceuilli Van Gogh : cloître, chapelle, musée (payant donc facultatif mais seulement 3 euros), chambre de l'artiste, techniques de soin de l'époque.

Un programme ma foi des plus interessants.

Rendez vous à
10h30 devant la maison de santé : route des Baux 13532 St Rémy de Provence (tél : 04.90.92.77.00)
ou au métro La Rose à Marseille à 8h30
ou à l'office du tourisme d'Aix à 9h00

Comme d'habitude prévoir un pique nique dans un sac à dos et de bonnes chaussures de marche.

Nicole

Nuages chrétiens, brumes chinoises


Le Christ salué par Saint Pierre et Saint Paul sur les rives du Jourdain, anonyme, mosaïque Rome (IX° siècle)


Temple taoïste dans les montagnes, attribué à Dong Yuan (907-960)

L’artiste doit-il rechercher la ressemblance formelle avec l’objet, le personnage ou le paysage qu’il veut représenter ?
Le point commun entre le deuxième concile de Nicée, les lettrés chinois dont, bien sûr Su Shi, et l’art des peuples premiers est d’avoir préconisé ou pratiqué un art répondant négativement à cette question. Pour quels motifs ? Si l’art ne vise pas à la ressemblance formelle que veut-il signifier ?
La réponse à cette question permet de cerner la fonction de l’art, permet de comprendre comment une culture, à un moment donné, appréhende la nature.

Nous avons choisi trois exemples qui se complètent et qui permettent de comprendre pourquoi, à un moment donné, les artistes ont préféré l’art significatif à l’art représentatif. Nous évoquerons assez rapidement l’art chrétien antérieur au XIV° siècle et l’art des peuples premiers pour nous attarder davantage sur l’art des lettrés chinois.

Les peintres de l’époque romaine ont su peindre de « vrais » ciels. Mais entre le VI° et le début du XIV° siècle, sous l’influence des théologiens, on assiste à une disparition presque totale de procédés tendant à créer l’illusion. Cette absence, nous dit Nadeije Laneyrie-Dagen « ne résulte pas d’une incapacité des peintres à imiter le réel mais d’une volonté délibérée. Les signes du réel, dans les tableaux du moyen-âge, devaient être assez explicites pour que le spectateur pût suivre l’histoire, mais aussi assez vagues pour que, l’œil ne s’arrêtant pas à la surface des objets, l’esprit fût renvoyé à ce qui apparaissait comme l’objet légitime de la peinture : la transcendance. Conciles et théologiens n’ont cessé de le proclamer ».

Ainsi le deuxième concile de Nicée qui en 787, comme nous l’a rappelé Françoise, mit fin à la première période iconoclaste, déclare « la peinture …doit signifier encore plus que représenter, il suffit que les figures soient purement schématiques ». On pourrait multiplier ce genre de déclarations : ainsi Saint Augustin qui parle de la « concupiscence des yeux », Jean Scot Erigène qui dénonce le danger d’une délectation sensuelle susceptible de mener à l’oubli des valeurs spirituelles. Pour ces théologiens, il suffit de représenter les éléments naturels par des signes comme on peut le voir dans l’illustration proposée où les nuages sont représentés par des rubans festonnés qui se distinguent à peine des signes qui plus en bas symbolisent l’eau du Jourdain (IORDANES).

Il faudra attendre Saint François d’Assise et Saint Thomas d’Aquin qui, intégrant la louange du monde dans l’adoration de Dieu, rendront licite de peindre d’une manière aussi réaliste que possible tous les éléments de la nature que Saint François célèbre dans le Cantique des créatures.

Comme les artistes primitifs chrétiens, les peuples premiers ont choisi de signifier plutôt que de représenter. Dans ses entretiens avec Georges Charbonnier, Claude Lévi-Strauss nous en donne les raisons.

Les artistes des peuples premiers comme les artistes de toutes les cultures se sont heurtés aux difficultés techniques de la représentation, de la ressemblance. Ces difficultés ont peut-être été plus grandes chez les peuples premiers en raison d’une insuffisance de moyens. « Quand on ne peut pas fournir un fac-similé du modèle, on se contente, ou on choisit de le signifier. »

Pourtant, cette insuffisance de moyens techniques ne suffit pas à expliquer la prédilection pour la fonction significative. Il y a, en effet, des populations dites primitives qui sont parvenues à une extraordinaire maîtrise technique de leurs procédés de fabrication comme la poterie péruvienne précolombienne ou le tissage archaïque péruvien qui sont parmi les plus parfaits jamais fabriqués. A quoi tient donc cette prééminence de la fonction significative ?

Les peuples premiers entourent les éléments naturels « du coussin amortisseur de leurs rêves ». L’univers dans lequel ils vivent étant largement surnaturel « il est irreprésentable par définition, puisqu’il est impossible d’en fournir le fac-simile ; ainsi, que ce soit par défaut ou que ce soit par excès, le modèle déborde toujours son image, les exigences de l’art débordent toujours les moyens de l’artiste ».

Venons en maintenant à la Chine et plus précisément à l’art lettré. Su Shi a déclaré dans une phrase restée célèbre : « rechercher la ressemblance en peinture est un enfantillage ». Nicole Vandier-Nicolas nous rappelle également que « pour échapper au piège du naturalisme, l’habitude se prit de peindre, non pas l’arbre lui-même, mais son ombre portée, par une nuit de lune, sur l’écran transparent des fenêtres. »

Les lettrés chinois ne cherchaient pas à exalter la grandeur de Dieu comme les peintres primitifs chrétiens. Le surnaturel n’est pas une notion de la pensée chinoise comme elle peut l’être pour les peuples premiers. En ne recherchant pas la ressemblance formelle que voulaient donc signifier les lettrés ? Je vous propose de l’aborder dans de prochains articles.
Jean-Louis


Bibliographie :
- L’invention de la nature, Nadeije Laneyrie-dagen, Flammarion
- Entretiens avec Claude Lévi-Strauss, Georges Charbonnier, Les Belles lettres
- Peinture chinoise et tradition lettrée, Nicole Vandier-Nicolas, Seuil

lundi 4 avril 2011

Marseille soutient le Japon





Le samedi 9 avril à partir de 19h30 à l'auditorium du Palais du Pharo
L'intégralité de la recette sera reversée aux enfants de Minami Sôma victimes du tremblement de terre, du tsunami, du froid des retombées radioactives et à présent livrés à eux-mêmes.

Nicole et Jean-Louis

P.S.
Les billets seront en vente, soit le jour même du concert à l'entrée de l'auditorium du Pharo, soit , les jours avant , ou le jour même, avec ou sans réservation par mail dans les locaux de l'association (coordonnées dans le communiqué de presse).
Il est aussi possible de réserver par mail, puis récupérer les billets à son nom à l'entrée, en remettant la somme, soit par courrier à l'adresse de l'association, soit sur place au moment de l'entrée.
La phrase indiquant le prix de "20 € ou plus", c'est pour les personnes qui désirent rajouter un don, au prix de la place.
Olivier

Flot d'asperges



Dans un premier temps, Gérard avait été très ambitieux pour notre groupe, puisqu’il avait prévu une montée aux sommets de Marseilleveyre et une descente par l’escalier des géants où je connus une des peurs de ma vie. Sur notre insistance, il a très gentiment réduit ses ambitions et c’est finalement une boucle bien sympathique et plus à notre portée que nous avons effectuée.

Partis de Callelongue, nous avons suivi le bord de mer photographiant au passage les iles du littoral resplendissantes sous le soleil et saluant les passagers des bateaux se dirigeant vers Cassis. Nous sommes passés devant la calanque de la Mounine, la plus petite des calanques, le restaurant du Belge pour arriver à la calanque de Queyrons (enfin, je crois que c’est ce nom). Premier coups de soleil, premiers bains de mer pour les plus courageux (l’eau était à 13 degrés). Jeux avec les petits crabes qui, même s’ils n’avaient pas de pinces d’or, ont bien su pincer les doigts des imprudentes (n’est ce pas chère Dan !).

Sur le chemin du retour quelques petits raidillons pour tester notre souffle et notre chinois (hen3 nan2). Puis, un chemin de crêtes qui traversait de beaux sous bois et offrait de magnifiques échappées sur le bleu étincelant de la mer où les hors bord creusaient un sillon d’écume blanche.
Et les asperges dans tout ça ? La récolte ne fut peut-être pas mirifique, mais elle fut honorable en tout cas suffisante pour que les plus sérieuses de nos chercheuses puissent parfumer une petite omelette.
Comme toujours avec Chinafi, le moment culturel ne fut pas absent. Savez-vous quelle image on utilise, en Chine, pour désigner un avare ? On dit que c’est un coq en fer. Allez plumer un coq en fer !

Une journée pleine de bonne humeur que nous avons conservée dans les embouteillages du retour en partageant nos dernières victuailles et en dégustant en imagination de bons plats épicés comme les Nouilles sur le pont, spécialité de Kunming. Nous étions affamés.

Un grand merci à Gérard pour sa conduite attentionnée et riche en anecdotes. Un grand merci à Nicole pour l’organisation. Un grand merci à tous pour vos sourires.

Nos futurs rendez-vous (bloquez vos agendas) :
- Le 17 avril pour la visite de Saint Rémy et de sa région
- Le 30 avril en soirée pour une grande fête chez Anne afin de célébrer ….mais chut, c’est un secret !
Jean-Louis

samedi 2 avril 2011

Voyage CHINAFI 2011

Chers Chinafiens et amis de la Chine

Suite a des problèmes liés au prix des billets proposés par les compagnies aériennes ainsi que des problèmes liés au manque d'accompagnateurs, les projets de voyage en Chine tels que nous vous les avions indiqués il y a quelques temps ont du être revus:

Nous maintenons donc un voyage cet été, il s'agit du voyage de Pékin à Xi'an, mais celui-ci est déplacé du 10 au 21 aout. Nous avons pu trouver des billets relativement moins cher, le cout du voyage s'en voit donc amoindri.

Vous trouverez le programme modifié de ce voyage sur notre site.

Veuillez svp vous manifester rapidement auprès de nous: un acompte de 100 euros est en effet du pour le 22 avril concernant la réservation des billets d'avion.

Prix du voyage : 2091 euros

Vous pouvez-nous joindre pour réserver directement par téléphone au 04 91 53 28 34 ou par mail à l'adresse contact@chinafi.net .

Nous serons bien sur heureux de répondre à toutes vos questions sur ce voyage.
En attendant de vous voir parmi nous,
Cordialement,
L'équipe CHINAFI.

Deux styles : le xieyi 写意, et le gongbi 工笔


Peinture gongbi : Anonyme d’époque Song (XII° siècle, Auberge


Peinture xieyi : Wang Jiu (XVIII° siècle)

Les historiens de l’art distinguent traditionnellement deux écoles dans la peinture chinoise. Même si cette distinction ne doit pas être poussée trop loin, elle est révélatrice non seulement de techniques différentes mais d’une conception dissemblable de la fonction de l’œuvre d’art, des rôles respectifs du peintre et du spectateur et des relations de la peinture avec les autres arts : calligraphie, poésie, musique.

Examinons tout d’abord les différentes techniques.
J.F. Billeter dans son livre L’art chinois de l’écriture nous indique que le genre xieyi (littéralement « noter une impression) est, en général, une peinture au lavis – une peinture produite par application d’encre plus ou moins délayée sur la soie ou le papier, sans dessin préalable. Le genre gongbi (littéralement « pinceau travaillé) est plus descriptif et plus attentif au détail.

Une peinture gongbi part d’un dessin fait au trait, avec un pinceau fin, et qui est ensuite coloriée. Remarquez dans la peinture gongbi proposée en illustration comme l’on peut distinguer les feuilles des arbres, le matériau du toit de l’auberge, les différents personnages : un fait la cuisine, un enfant s’amuse, un homme fait la sieste sur un coin de table, comme on peut encore le voir de nos jours dans les auberges chinoises. Ce type de peinture va intéresser en nous l’historien, l’ethnologue soucieux d’étudier les scènes de vie, le détail des vêtements, des visages, des coiffures, des habitations de telle ou telle époque, de telle ou telle région.

La peinture de style xieyi représente à peu près le même sujet. Mais voyez comme les motifs sont à peine esquissés. La frondaison des arbres se confond avec les nuages, les montagnes en arrière plan. Le personnage est représenté d’une manière maladroite, enfantine. Ce genre, plus intemporel, va émouvoir en nous le poète qui veut rêver sur les brumes, les nuages formés par les lavis d’encre ou suggérés par les blancs, les vides qui occupent une place si importante dans la toile. Le genre xieyi, genre volontairement inachevé, art de l’imparfait pour reprendre la formule des maîtres du thé laisse une place beaucoup plus importante à l’imagination du spectateur.

Ce style était essentiellement pratiqué par ces amateurs qu’étaient les lettrés, alors que la peinture gongbi était plutôt l’œuvre de professionnels, d’académiciens. Or, les lettrés chinois, comme on le sait, étaient non seulement des fonctionnaires et des hommes politiques. C’étaient aussi des calligraphes, des peintres, des poètes, des musiciens et des philosophes. Cela explque les liens que l’on peut observer entre la peinture xieyi et ces différents arts. Pour dire les choses d’ne autre manière, le genre xieyi se prête à l’intertextualité.

Liens avec la calligraphie tout d’abord : même matériel, encre et pinceau, même exploitation du monochromatisme, même vocabulaire. Dans les deux arts on parle de dian (points ou éléments ramassés) et de hua (éléments allongés, développés).

Liens avec la poésie. « Les peintures sont des poèmes et les poèmes des peintures ». Ces liens trouvent souvent leur manifestation dans des poèmes qui sont calligraphiés à même la peinture (voir illustration).

Liens avec la musique. J.F. Billeter et Ding Wenjun nous rappellent que Schopenhauer voyait dans la musique le plus noble des arts car c’est celui qui, par son caractère informel, laisse le plus de place à l’imagination du récepteur. Or, on l’a vu, c’est l’idéal que se propose le genre xieyi en refusant la recherche de la ressemblance formelle, en se voulant non descriptif, imparfait inachevé.

En évoquant la recherche ou non de la ressemblance formelle nous abordons un des sujets les plus débattus dans l’esthétique de tous les pays et de tous les temps. Nous lui consacrerons un prochain article. Elle nous permettra d’étudier comment certaines peintures peuvent refléter la vision du monde de leur auteur, spécialement quand ceux-ci sont également des philosophes. Pour terminer ce billet et entretenir le suspense, je vous propose une petite énigme. Quels rapports y a t-il entre le deuxième concile de Nicée, le poète Su Shi et les tribus indiennes de la forêt amazonienne ?

Jean-Louis

Bibliographie :
L’art chinois de l’écriture, Jean-François Billeter, Skira
L’art en Chine, Yolaine Escande, Hermann