lundi 31 mars 2014

Victor Hugo et le "Sauvage"


Je suis donc allé lire l’article de Télérama « Georges Clémenceau et l’Asie » cité par Françoise dans son dernier message. Je me permets de compléter la citation faite par Françoise, citation extraite de la réponse de Georges Clémenceau à Jules Ferry à l'Assemblée : « …la conquête que nos préconisons, c’est l’abus pur et simple de la force que donne la civilisation scientifique sur les civilisations rudimentaires pour s’approprier l’homme, le torturer, ou extraire toute la force qui est en lui au profit du prétendu civilisateur. Ce n’est pas le droit, c’en est la négation. »
Cette déclaration m’a fait penser à un poème de Victor Hugo figurant dans  Toute la lyre , un recueil posthume. Grâce notamment aux travaux des ethnologues, les idées contenues dans ces deux textes concernant l’égalité des races, la remise en cause de la suprématie de notre civilisation, l'iniquité de toute colonisation sont plus généralement acceptées (quoique ... !) Elles étaient révolutionnaires à l’époque où elles ont été formulées.

Jean-Louis

Voici le poème de Victor Hugo : 

…Vous croyez civiliser un monde
Quand vous troublez ses lacs, miroirs d’un dieu secret,
Lorsque vous violez sa vierge, la forêt ;
Quand vous chassez du bois, de l’antre, du rivage
Votre frère aux yeux pleins de lueurs, le sauvage
Cet enfant du soleil peint de mille couleurs,
Espèce d’insensé des branches et des fleurs,
Et quand jetant dehors cet Adam inutile,
Vous peuplez le désert d’un homme plus reptile,
Vautré dans la matière et la cupidité,
Dur, cynique, étalant une autre nudité,
Idolâtre du dieu dollar, fou qui palpite,
Non plus pour un soleil mais pour une pépite,
Qui se dit libre, et montre au monde épouvanté
L’esclavage étonné servant sa liberté !

Oui, vous dites : - Voyez, remplaçons ces brutes ;
Nos monceaux de palais chassent leurs tas de huttes ;
Dans la pleine lumière humaine nous voguons ;
Nos théâtres, nos parc, nos hôtels, nos carrosses !-
Voyez nos docks, nos ports, nos steamers, nos wagons,
Et vous vous contentez d’être autrement féroces !
Vous criez :- Contemplez le progrès ! admirez!-
Lorsque vous remplissez ces champs, ces monts sacrés,
Cette vieille nature âpre, hautaine, intègre,
D’âmes cherchant de l’or, de chiens chassant au nègre …

samedi 29 mars 2014

Clémenceau, le Tigre et l'Asie





Georges Clémenceau (1841-1929) était un passionné des philosophies et des arts orientaux. Il collectionna plus de 4500 pièces, surtout japonaises et s’adonna à la cérémonie du thé.
En 1893, il créa un département asiatique au Louvre et ouvrit le musée d’Ennery « parce que la civilisation des Chinois est plus ancienne que la nôtre… »

Dans une réponse à Jules Ferry en 1885 à l’Assemblée, il dit : 
« Races supérieures ! races inférieures ! Pour ma part, j’en rabats singulièrement depuis que j’ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la France devait être vaincue… parce que le Français est d’une race inférieure à l’allemande […] Race inférieure, les Chinois ! avec cette civilisation dont les origines sont inconnues et qui paraît avoir été poussée dans ses extrêmes limites… »

Voici quelques extraits d’un article de Télérama, n° 3349 qui nous fait découvrir Clémenceau sous un angle peu connu (enfin pour moi !) et qui donne envie d’aller voir l’exposition : 

« Clémenceau, le Tigre et l’Asie » 
au Musée Guimet, jusqu’au 16 juin.

Françoise

vendredi 28 mars 2014

La Chine et autres pays d'Asie à la Maison de l'artisanat et des métiers d'art à Marseille




Prochainement deux expositions intéressantes à la Maison de l'artisanat et des métiers d'art de Marseille.

11/04 au 21/05/2014
Marionnettes et Théätres d'ombres d'Asie entre les divinités et les hommes


Les théâtres d'ombres et les marionnettes d'Asie font partie de notre patrimoine culturel depuis des siècles. De l'hindouisme à l'islam, du bouddhisme à l'animisme, elles célèbrent les systèmes de culte qu'elles déstabilisent par le jeu. Parfois de cour royale, parfois de rue, jouant pour des rois ou des villageois, populaires ou élitistes, adulées ou interdites, ces créatures magiques seront toujours les gardiennes de la connaissance. L'Association l'Ombre Chinoise propose au travers 300 marionnettes et ombres d'Asie de raconter la mémoire des peuples du monde.

06/06 au 26/07/2014
Costumes et parures du sud-ouest de la Chine

Dans le cadre de l'année FRANCE-CHINE 50, Liliane et Armel Chichery, " ethno-collectionneurs-voyageurs"... collectent depuis 30 ans tout textile artisanal, tribal ou même inconnu, en privilégiant depuis une quinzaine d'années la Birmanie, la Thaïlande, le Vietnam, le Laos et le Sud de la Chine. Ils ont ainsi sauvé de l'oubli plus de 1200 pièces, dont un millier des ethnies du Yunnan et du Guizhou. Ils proposent pour la première fois en France, une présentation de costumes Miao, Dong, Yi, Yao, Buyi, Zhuang, Hani, Shui, Bai et Li avec en contre-point, des objets usuels se rapportant aux traditions de ces ethnies rencontrées lors de leurs nombreux voyages dans le Sud de la Chine.

Maison de l'Artisanat et des Métiers d'Art
21 cours d'Estienne d'Orves - 13001 Marseille - Entrée libre du mardi au vendredi
de 10h à 12h et de 13h à 18h et le samedi de 13h à 18h.



Un grand merci à Michel qui m'a communiqué l'information.
Jean-Louis

mardi 25 mars 2014

Au revoir Vicky



Vicky est une personne très discrète. Il nous a fallu un certain temps pour découvrir ses talents. Je la revois jouant Chang ting wai sur le piano de Françoise. Mais c’est surtout une excellente chanteuse et une excellente danseuse. Je me souviendrai longtemps de cette soirée du 21 juin de l’an passé où nous avons chanté pour la fête de la musique dans les rues du Panier. Elle dansa sur Ming yue ji shi you. Les passants, un peu surpris par ce groupe atypique mais sympathique s’arrêtaient, ravis du spectacle, et nous applaudissaient.
Et, sans doute, vous vous souvenez de sa prestation pour la célébration du Nouvel An.

Vicky rentre en Chine samedi. Pour lui témoigner notre affection, nous lui avons offert ce soir une petite fête. Nicole avait préparé une omelette parfumée aux asperges ramassées dimanche à Saint Blaise. L’omelette était joliment présentée sur des toasts entourés de carottes. Françoise avait confectionné un excellent gâteau au matcha dont elle a maintenant le secret Le tout était délicieux. Et puis, bien sur nous avons chanté et levé les verres à la santé de notre amie.

Bon retour, chère Vicky. A bientôt, peut-être, en Chine ou en France. De toute façon on reste en contact. Forts des nouvelles que nous recevons régulièrement des anciens choristes nous savons que cette promesse sera tenue.
Jean-Louis

dimanche 23 mars 2014

Saint-Blaise



Lorsque nous pénétrons dans le site archéologique de Saint-Blaise une première bonne surprise nous attend : la visite est gratuite. La gardienne nous distribue un petit dépliant très bien fait contenant le plan du parcours et un petit aperçu historique. En le lisant j’apprends avec surprise que Saint Blaise, cité gauloise, fut un temps concurrente de Massilia, cité phocéenne. L’oppidum est placé dans un beau cadre. Il domine l’étang de Lavalduc dont Ping me fait remarquer les eaux rouges. Renseignements pris, cette couleur est due à la présence du sel qui fut une des premières richesses de l’endroit.

En cheminant parmi les ruines, des panneaux commentés par Annie nous permettent de découvrir les différentes époques de Saint-Blaise :
- La période archaïque (VI° et V° siècle av. JC)
- La période hellénistique (II° siècle av. JC)
- La période paléochrétienne du V° au IX° siècle)

Ce qui donne un charme particulier à ces ruines c’est qu’elles sont entourées d’un écrin de verdure. Parfois, d’un point de vue élevé, nous découvrons l’ensemble assez impressionnant des vestiges de la ville. Nous voyons les restes des fortifications, des tours de guet, des portes dérobées, des maisons. Nous pouvons observer distinctement le tracé de ce qui fut la rue principale. Nous imaginons les encombrements de chariots, les cris des habitants, les étalages des marchands. Sur les sentiers que nous suivons on peut voir encore les rainures laissées par les voitures. Une série de dix vitrines jalonnent le chemin : la vitrine des carnets de fouilles, celle des parties manquantes, des fortifications minuscules …Avant de quitter le site nous pouvons admirer un magnifique pressoir à huile dont l’extrémité est ornée d’une tête de cheval.

Plusieurs photos de groupe devant la chapelle Saint-Blaise. Au pied de la chapelle actuelle on peut voir les vestiges d’une très ancienne église.

Mais, il est midi passé. Nous cherchons un coin pour notre pique-nique. Nous longeons une nécropole rupestre, les ruines d’une bergerie. Nous trouvons bientôt un coin à l’abri de vent qui souffle un peu aujourd’hui. Comme d’habitude nous partageons nos provisions et nous mélangeons allégrement le sucré et le salé. Voici l’heure de la chorale photographiée par Isabelle. Une grande partie de notre ancien répertoire y passe. Un moment d’émotion lorsque nous chantons Chang ting wai pour Vicky.

Nous traversons la forêt de Castillon, à la recherche de l’étang du Pourra. En chemin, Dan fait une magnifique récolte d’asperges. Celle d’Eric, à côté, fait pauvre figure. Les sentiers sont couverts de poudre jaune, particulièrement accumulée près des flaques d’eau, restes des pluies de la veille. Il s’agit du pollen des pins. Jamais je n’en avais vu autant. L’étang n’est pas facile à trouver : à droite ? à gauche ? Bientôt du haut d’une colline nous l’apercevons. En bordure une zone de roseau que l’on nomme, je l’apprends, une roselière. Grâce aux lunettes d’approche d’Olivier j’aperçois plusieurs cygnes qui naviguent sur les eaux.

Mais voilà, il faut rentrer. Un grand merci à Nicole pour nous avoir fait connaitre ce lieu riche aussi bien par les vestiges archéologiques qu’il contient que par les nombreux sentiers de randonnées qui le parcourent et par la beauté des étangs qui l’entourent.
Jean-Louis

PS : Vous pourrez voir les très belles photos d'Annie en copiant ce lien dans votre navigateur :
https://plus.google.com/photos/116287098871797577938/albums/5994049286302077969?authkey=CO7XlZSqoMPBuQE

vendredi 21 mars 2014

Mille


Le dimanche 27 mai 2007 à 21h12, Gwen créait le blog de Chinafi. Elle écrivait : « Alors voilà, le blog est lancé, il revient à chacun des membres de cette amitié franco-chinoise, qui s'étend un peu plus chaque jour, de le faire vivre...Longue vie au blog de Chinafi ! »

Son souhait a été exaucé car voici aujourd’hui le millième message du blog (avec il est vrai quelques brouillons).

Le blog est un peu le reflet et la mémoire des activités de Chinafi et je pense que l’on peut dire que de ce côté là tout va bien. On peut bien sûr regretter le petit nombre de contributeurs et de commentaires. En rédigeant cet article, je regardais le premier post d’Olivier sur les « Demoiselles de Nankin » qui avait donné lieu à un véritable échange  (13 commentaires). Toutes les idées pour relancer la dynamique du blog sont les bienvenues. N’hésitez pas à les exprimer. Mais ne boudons pas notre plaisir puisque le dernier commentaire est plutôt encourageant : « ce blog est génial ! »

Par ailleurs, cette année nous fêterons l’anniversaire des 10 ans de la première sortie Chinafi qui eut lieu le 9 mai 2004. Je me souviens de ce que m’a dit Christiane ce jour là : « Je crois que nous avons fait la connaissance d’une association exceptionnelle ». Elle avait raison. Alors longue vie à Chinafi, à notre amitié …et au blog,

Jean-Louis

lundi 17 mars 2014

La langue est l'âme d'une civilisation


画蛇添足

Huà Shé Tiān Zú

Dans ses entretiens avec Claude Lévi-Strauss, Georges Charbonnier déclare : « Je vous prie de me permettre une grossièreté : faire une citation. » Cette phrase surprendrait probablement les lecteurs chinois pour qui les citations loin de constituer une grossièreté sont des figures qui réhaussent le style. Ces citations prennent parfois la forme de chengyu comme celui qui figure en  illustration qui est extrait d’un livre intitulé  Il était une fois au pays des chengyu (Editions You Feng).
Cet ouvrage contient une excellente préface qui défend la même idée que celle exposée par Joël Bellassen dans sa conférence : une langue n’est pas un simple outil de communication : « elle est porteuse de l’âme d’une civilisation et contient l’ensemble des représentations symboliques d’une culture, témoin d’une vision du monde.C’est pourquoi la traduction pose tant de problème : il n’est jamais aisé de faire concorder deux systèmes symboliques. C’est ainsi que toute traduction peut être contestée et est contestable ».

Les chengyu, on le sait, sont des expressions en quatre caractères qui souvent font référence à un conte de l’antiquité. Les étudier constituera donc pour le lecteur étranger un moyen de s’imprégner de la culture et de la sensibilité chinoises.

Le chengyu que j’ai choisi hua4 she2 tian1 zu2 signifie mot à mot « dessiner serpent ajouter pieds » que l’on peut développer en « dessiner un serpent en lui ajoutant des pieds ». Pour en comprendre la signification il faut se reporter à une histoire légendaire.  

Il était une fois, au temps des Royaumes Combattants, un homme du royaume de Chu qui, lors d’une réception qu’il organisait, fut débordé par le nombre des invités. Il était bien embêté car il n’y avait pas assez de vin pour tous les participants. Quelqu’un proposa de faire un concours de dessin dont le sujet serait un serpent. Celui qui finirait le premier serait le premier à boire le vin. Un des participants eut bientôt fini. Mais il eut l’idée saugrenue d’ajouter des pattes à son serpent et termina son dessin bon dernier alors qu’il n’y avait plus de vin. 

Il y a une expression française qui correspond à ce chengyu c’est : « le mieux est l’ennemi du bien ». On peut toutefois constater que l’expression française est moins imagée et, à ma connaissance, ne fait pas référence à une conte. 
On comprend le goût des Chinois pour les citations. C’est pour eux le moyen de se rattacher à une tradition culturelle, « de renouer avec des pensées qui peuvent faire vibrer une part de l’enfance encore présente en eux et de retourner aux sources d’un inconscient collectif forgé, au cours des siècles, sur la Terre des Ancêtres. » En outre, il ne faut pas oublier que dans le plaisir de citer ou d’entendre un chengyu (comme d’ailleurs un poème) figure la visualisation des caractères composant ce chengyu (ou ce poème). C’est la conjugaison simultanée de ces différents éléments : référence à des racines culturelles, musicalité de la langue, visualisation des caractères qui explique la puissance évocatrice des chengyu et des poèmes chinois qu’il est bien difficile de traduire.

Jean-Louis

samedi 15 mars 2014

La langue est la maison de l'être (Heidegger)


 




En Octobre dernier, Joël Bellassen était venu donner une première conférence dont le sujet était : 
« Le chinois tel qu’il est, le chinois tel qu’il va ». 
Dans le prolongement de cette intervention, Joël Bellassen est revenu nous voir et a développé les liens qui existent entre l’écriture, la langue et la pensée chinoise. Cette fois, nous avions assez de places - grâce à l’auditorium de la Maison de la Région - pour accueillir environ 100 personnes enthousiastes et attentives.

Pour Joël Bellassen les langues ne sont pas de simples outils de communication : et c’est particulièrement visible en ce qui concerne la langue et l’écriture chinoises : elles façonnent les contours de la pensée, se révèlent formatrices dans de nombreux domaines et peuvent expliquer certains traits culturels.

-        - La langue et l’écriture chinoise sont une école d’observation car le visuel est omniprésent. Dans une écriture non alphabétique comme le chinois,  pour épeler son nom au téléphone on a recours à des images pour décrire les éléments qui composent le caractère. Pour faire l’appel dans une classe par exemple, on commence par la personne dont le caractère représentant le nom comporte le moins de traits. Ce qui suppose aussi que l’on visualise le nom.

-          - L’écriture chinoise avec l’art de la calligraphie est une école d’esthétique.

-          - Avec l’apprentissage des tons la langue chinoise est formatrice d’une oreille musicale.

-      - L’écriture chinoise est une école de défi et d’entrainement. Quand sait-on lire ? Avec l’écriture romaine, il suffit de connaitre les 26 lettres de l’alphabet et de maitriser les sons produits par leur combinaison pour savoir lire. Rien de tel avec une écriture non phonétique. Même les Chinois ne sont jamais à l’abri de rencontrer un « tigre » dans un texte, c'est-à-dire un caractère qu’ils ne connaissent pas et qu’ils ne sauront pas prononcer. Apprendre le chinois est donc un défi et relever ce défi est souvent une motivation pour les apprenants de cette langue. Cependant, même si l’on n’a jamais fini d’apprendre à lire le chinois, on peut estimer qu’avec la connaissance de 1400 caractères on peut lire la plupart des textes.

-         - L’écriture chinoise ne sert pas à noter des sons. Les caractères chinois sont en eux-mêmes une unité de sens. Ce qui conduit à ce paradoxe : l’écriture chinoise est à la fois la plus opaque et la plus transparente qui soit. La plus opaque car il est impossible de savoir comment se prononce un caractère si on ne le connait pas. La plus transparente car l’étymologie d’un mot est immédiatement visible. A tel point que Joël Bellassen a parfois eu recours au caractère chinois pour comprendre la signification d’un mot français. Par exemple, la décomposition du caractère chinois signifiant algorithme indique clairement qu’il s’agit d’une méthode de calcul.

-     - Bien plus, un caractère chinois non seulement signifie une chose mais peut, dans une certaine mesure, la remplacer. Par exemple, si le thème astral d’un enfant montre qu’il va manquer de l’élément eau ou de l’élément métal (au sens astrologique) on choisira un prénom comportant graphiquement ces éléments. On comprend que l’on ait pu qualifier l’écriture chinoise « d’empire du sens. »

-       -  Une autre caractéristique de la langue chinoise est la « logique floue » Plutôt qu’un sens précis un caractère évoque une idée. Il demande à être précisé par un contexte. Joël Bellassen a pris un exemple fort intéressant. Le même caractère (qíng) suivant le contexte peut signifier amour, sympathie ou encore situation (état) d’un pays. Cela paraitra surprenant dans une culture habituée à séparer le subjectif (les sentiments) de l’objectif (une situation). C’est par contre possible dans la culture chinoise où la distinction entre le sujet et l’objet est moins nette.
 
-      Il n’y a pas d’article en chinois. On ne dit pas « il y a un micro sur la table » mais il y a « du micro sur la table ». Le chinois massifie en permanence. Cela explique une approche globalisante des choses où tout est en relation avec tout.
 
-         - Le chinois a tendance à se passer de l’usage du sujet Le chinois est une langue impersonnelle où la personne est en retrait. La non distinction du couple sujet/objet (l’absence de retrait du sujet, comme le disent les philosophes) a eu des conséquences importantes sur un moindre développement de la pensée analytique (la pensée chinoise, on l’a vu, est globalisante), sur le développement des sciences, sur la peinture (la perspective cavalière est préférée à la perspective linéaire).

-       - Le chinois valorise les clichés, les citations, les aphorismes. La pensée chinoise opère à partir d’un substrat commun implicitement accepté. Ce qui importe ce n’est pas l’originalité du propos, mais la subtilité de l’allusion. Confucius le disait: « Je transmets, sans rien créer de nouveau ».

-          - Il n’y a pas eu de Démosthène chinois. La Chine a préféré l’éloquence graphique à l’éloquence verbale.

Voici très rapidement et incomplètement résumée une conférence qui fut passionnante de l’avis de tous les auditeurs. Dans une remarque liminaire, Joël Bellassen nous a confié qu’il avait une double formation de sinologue et de philosophe. Cette formation à la philosophie lui permet de prendre du recul et de ne pas être aspiré par ce tourbillon que constitue, selon ses propres termes, l’apprentissage du chinois. Grâce à ce recul il a pu analyser les relations qui existent entre le langage, l’écriture et la pensée. Cette analyse qui peut sembler abstraite était rendue vivante par de nombreuses anecdotes tirées de son expérience et de très belles citations comme par exemple celle de Wittgenstein : « les limites de mon langage signifie les limites de mon propre monde ».

Merci Monsieur Bellassen. Vous nous avez promis de revenir. Nous attendons votre prochaine conférence avec impatience.

Jean-Louis

jeudi 13 mars 2014

Promesse tenue

Sissy Zhou nous avait annoncé le voyage et la sérénité, elle et ses élèves ont tenu leur promesse. Nous avons été transportés par la musique du GU ZHENG.
Elle nous a révélé les mérites insoupçonnés de cet instrument, il permettrait de guérir de la maladie d'Alzheimer, incroyable non ?
Nous en saurons plus grâce à une conférence à venir : la médecine et le GU ZHENG car ses vertus sont innombrables.
    Ci dessus une partition de GU ZHENG, nous allons nous en inspirer pour élargir le répertoire de notre chorale et quand nous serons fin prêts nous inviterons Sissy au 36 rue falque!!!
On peut rêver...

Nicole

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dimanche 9 mars 2014

Nos années sauvages (Days of being wild)


Nos années sauvages (Days of being wild) sorti en 1990 est le second long métrage de Wong Kar-Way.

Son héros, Yuddy, jeune homme désœuvré dans le Hong Kong des années soixante, est de ceux qui ne peuvent pas vivre dans la durée, particulièrement un amour. Comme l’oiseau sans patte de Tennessee Williams : « il ne s’arrête jamais de voler et s’endort dans le vent. Il ne se pose qu’une seule fois dans sa vie …pour mourir ».

Il multiplie les aventures féminines. Il demande à Su Li Zhen, la première que nous voyons dans le film, de regarder sa montre avec lui pendant une minute, une minute d’amitié, le 16 avril 1960 à 15h00. C’est tout ce qu’il pourra lui offrir. Lorsque Yuddy refusera sa demande en mariage, Su s’enfuira, promettant de ne jamais revenir. Elle reviendra pourtant abandonnant sa fierté, son amour propre, ses rêves de mariage car « l’orgueil sort du cœur le jour où l’amour y entre ». Mais ce sera pour trouver sa remplaçante, Mimi, que Yuddi abandonnera à son tour pour partir aux Philippines à la recherche de ses origines. Ni Su Li Zhen, ni Tide le policier confident, ni Mimi, ni Sab l'ami de Yuddy ne concrétiseront leurs rêves de réciprocité. L’amour est aveugle à ce qui n’est pas son objet et la douleur ne rend pas toujours compatissant à celle d’autrui. Su Li Zhen rejetée, rejettera à son tour violemment Sab en lui criant : « ne m’aime pas ! »

Alors que reste-t-il à ceux qui, comme Yuddy, ne peuvent pas vivre dans la durée ? Si ce n’est à élever l’instant, l’éphémère au niveau de l’éternité. A faire tenir l’éternité dans un instant. Yuddy se souviendra de la minute d’amitié qu’il a donnée à Su quand il se posera pour mourir. Su en conservera aussi la mémoire : « Je croyais qu’une minute passait vite. Parfois ça dure longtemps. Un homme m’a dit en regardant sa montre : « je n’oublierai jamais cette minute ». C’était si doux à entendre ».

Cette minute d’éternité on la retrouvera dans les films ultérieurs de Wong Kar-Way : In the mood for love, 2046 et plus récemment The Grandmaster : dans un frôlement de mains ou de visages, ébauche d’une histoire d’amour qui n’aura pas lieu. Beauté de ces vues : Hong-Kong sous la pluie, un téléphone qui ne sonne pas, ou encore le visage de cette jeune fille s'offrant à un inconnu dans une chambre d'hôtel : "Monsieur vous êtes seul ?" Prostitution, peut-être, mais certainement aussi, et ce n'est pas incompatible, recherche désespérée d'un rempart contre la solitude et le temps qui passe.

Voilà. Le DVD est disponible à l’Alcazar. Enfin, à partir de mardi quand je le rendrai.

Jean-Louis

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vendredi 7 mars 2014

Théatre et musique



Une semaine riche en événements culturels :
Outre la conférence de Joël Bellassen,  il y a aussi une pièce de théâtre en chinois, surtitrée, jouée par des acteurs taiwanais au théâtre des Bernardines, du 11 au 15 mars : Il s'agit de la dernière création du metteur en scène marseillais Franck Dimech, LES ECORCHES, d'après la Dispute de Marivaux et Manque de Sarah Kane. <http://www.theatre-bernardines.org/>

 Et pour compléter cette semaine culturelle chinoise, une annonce transmise par Olivier :
Concert de guzheng par Sissy Zhou le jeudi 13 mars :

Sissy Zhou évoquera les particularités de cette musique. Avec ses élèves, elle  présentera le Gu Zheng. Elle interprétera quelques œuvres musicales traditionnelles et ses propres compostions.  Une séance de voyage. Plénitude et sérénité assurées.

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