dimanche 28 septembre 2008

Conférence et journée portes ouvertes Chinafi



Chinafi organise un après midi portes ouvertes le 4 Octobre de 14 à 16h00 à l'Espace Culture à Marseille 42 La Canebière.
De 16 à 18h00 notre amie Yang Zhi Hong donnera une conférence sur le dernier empereur.
Venez nombreux.
Jean-Louis

mardi 23 septembre 2008

Jing Ye Si, Pensée dans une nuit tranquille



Le poème que nous vous présentons aujourd’hui est de Li Bai (701-762 après Jésus-Christ).
Il est connu de pratiquement tous les Chinois. Une amie à qui je demandais s’il avait été mis en musique me répondit : « Désolée à ma connaissance pas de chanson sur Jingyesi, au moins pas populaire. Peut être tellement beau est ce poème, personne n’ose faire la mélodie par peur de ne pas être à la hauteur. »

La calligraphie de Weiyi

Regardons la calligraphie qui est fort belle.
Les caractères répétés sont calligraphiés avec des graphies différentes pour éviter la monotonie.
Ainsi, « tou», la tête, dernier caractère de la 2ème colonne et 5ème caractère de la troisième colonne.
Ou encore, «yue », la lune, 4ème caractère de la première colonne et 3ème caractère de la troisième colonne. Notez comme ce dernier caractère est relié à / engendré par le « yue » du caractère « ming » qui le précède.

Les caractères shuang (givre) « ju » (lever) sont particulièrement beaux.


Ce poème est un quatrain qui appartient au style wu yan jue qui signifie qu’il y a cinq caractères par vers.

Les rimes :
Notons la rime des derniers caractères des premier (guang), second (shuang), et dernier vers (xiang).


Le mot à mot à présent :


chuang : lit
qiang : devant
ming : clair, clarté
yue : lune
guang : lumière

yi : mystère, doute, supposer
shi : être
di : terre
shang : au dessus
shuang : givre, gelée blanche

ju : lever
tou : tête
wang : regarder au loin
ming : clarté
yue : lune

di : bas, baisser
tou : tête
si : penser
gu : vieux
xiang : maison l’expression gu xiang signifie pays natal

Une première traduction, proche du mot à mot :
Pensées dans le calme de la nuit.
Devant mon lit, la lumière de la lune brillante
Serait ce du givre sur la terre ?
Levant la tête je vois au loin la lune claire
Baissant la tête, je pense à mon pays natal.

Une deuxième traduction :
Réveil d’un voyageur,
Un lac de lueur devant mon lit
Est-ce du givre sur la terre ?
Voyant en haut la lune claire,
Je me noie dans un lac de nostalgie.

Une troisième proposée par François Cheng :
Devant mon lit clarté lunaire
Est-ce du givre couvrant la terre ?
Levant la tête, je vois la lune ;
Les yeux baissés : le sol natal


Une quatrième sans doute la plus fidèle au sens du texte :
Pensée dans une nuit tranquille
Devant mon lit, la lune jette une clarté très vive;
Je doute un moment si ce n'est point la gelée blanche qui brille sur le sol.
Je lève la tête, je contemple la lune brillante;
Je baisse la tête et je pense à mon pays.

Ces quatre propositions de traductions rendent bien compte des difficultés inhérentes à toute traduction et sans doute encore plus quand il s’agit de poésie… et de langue chinoise ! Car l’important – me semble-t-il – est de recréer des images, des impressions similaires. La langue chinoise est elle-même assez elliptique, laissant au lecteur le soin d’établir ses propres liaisons. Et il me semblerait dommage de trop combler ce vide essentiel dans le poème comme dans la calligraphie, c’est pourquoi la traduction de François Cheng me plait bien, elle est dans la ligne de ses réflexions sur le vide : « Car le vide médian qui réside au sein du couple Yin-Yang réside également au cœur e toutes choses ; y insufflant souffles et vie, il maintient toutes choses en relation avec le Vide suprême, leur permettant d’accéder à la transformation et à l’unité. »

La thématique :
Nous retrouvons des thèmes chers à la sensibilité chinoise. : La lune, la nostalgie du pays natal qui étreint le voyageur ou l’exilé. Ces thèmes apparaissent si souvent dans la poésie chinoise qu’ils nous paraissent au premier abord manquer d’originalité. Qu’est ce qui fait qu’il n’en va pas de même pour le lecteur chinois ?
Pour le comprendre, il est intéressant de lire l’article, trouvé sur internet (www.afpc.asso.fr/wengu/Tang/Li_Bai), que nous reproduisons ci-dessous.

« Cette petite pièce appartient au genre que les Chinois nomment vers coupés, c'est-à-dire où, sans préambule, l'on entre tout droit dans le sujet. Peut-être ne sera-t-il pas sans intérêt de voir comment l'analyse un commentateur chinois :
« Li-taï-pé, dit-il, trouve moyen d'être ici tout à la fois d'une concision, d'une clarté et d'un naturel extrêmes, et c'est précisément parce qu'il est naturel, qu'il fait toujours entendre infiniment plus qu'il ne dit. La lune jette une clarté brillante devant son lit ; il doute un moment si ce n'est point de la gelée blanche ; nous jugeons, sans qu'il nous le dise, qu'il dormait, qu'il s'est éveillé et qu'il est d'abord dans ce premier instant du réveil où les idées sont confuses. Il pense aussitôt à la gelée blanche, c'est-à-dire au point du jour, à l'heure où l'on se met en route. N'est-ce pas la première pensée d'un voyageur qui se réveille ?
« Il a levé la tête ; il aperçoit la lune, il la contemple ; puis il baisse la tête et pense à son pays. C'était bien un voyageur ou un exilé. Ce dernier mot ne laisse plus de doute. En voyant cette brillante lumière, il a songé naturellement qu'elle éclairait aussi des lieux qui lui sont chers, il regrette avec amertume de passer une nuit si belle loin de chez lui.
« Le poète nous a fait suivre jusqu'ici la marche de ses pensées par une route si droite que nous n'avons pu nous en écarter. En terminant par ces seuls mots : Je pense à mon pays, il laisse chacun imaginer les pensées tristes qui l'assailleraient lui-même s'il était absent, et après avoir lu sa pièce, chacun se prend à rêver. »

Voici un autre commentaire que nous devons à Jaques Dars (Notes du roman Au bord de l’eau ). « …Sous les Tang, le vers de quatre pieds est remplacé par le vers de cinq pieds avec une forte césure après le deuxième pied, et la prosodie tient désormais compte de la polytonie de la langue chinoise (à l’intérieur de chaque distique, les tons plans et obliques s’opposent régulièrement d’un vers à l’autre). Ces poèmes réguliers …affectent la forme de quatrains. Ils conviennent particulièrement à des notations impressionnistes (jue-ju, « vers interrompus », mais «dont l’idée se propage à l’infini quand la parole s’arrête»).

Il est particulièrement émouvant de rapprocher ce poème des premières pages de La Recherche du Temps Perdu lorsque le Narrateur décrit la confusion que nous connaissons au réveil :
«chambres d’été où l’on aime être uni à la nuit tiède, où le clair de lune appuyé aux volets entrouverts, jette jusqu’au pied du lit son échelle enchantée, où on dort presque en plein air, comme la mésange balancée par la brise à la pointe d’un rayon… »

Je pense aussi à ce poème de Victor Hugo, bien sûr très différent, beaucoup plus long, avec un scénario, l’évocation d’un drame humain, politique…
Mais on y trouve aussi un aspect elliptique, le rapprochement de la lune et de l’eau (2 éléments Yin) et ce calme, cette immuabilité de la lune, toujours présente à la fenêtre, indifférente au drame qui se joue (comme à la tristesse du voyageur), particulièrement bien rendue dans ce poème par la reprise du 1er vers au dernier vers, créant ainsi cette impression de temps cyclique.

Clair de lune
La lune était sereine et jouait sur les flots. -
La fenêtre enfin libre est ouverte à la brise,
La sultane regarde, et la mer qui se brise,
Là-bas, d'un flot d'argent brode les noirs îlots.

De ses doigts en vibrant s'échappe la guitare.
Elle écoute... Un bruit sourd frappe les sourds échos.
Est-ce un lourd vaisseau turc qui vient des eaux de Cos,
Battant l'archipel grec de sa rame tartare ?

Sont-ce des cormorans qui plongent tour à tour,
Et coupent l'eau, qui roule en perles sur leur aile ?
Est-ce un djinn qui là-haut siffle d'une voix grêle,
Et jette dans la mer les créneaux de la tour ?

Qui trouble ainsi les flots près du sérail des femmes ? -
Ni le noir cormoran, sur la vague bercé,
Ni les pierres du mur, ni le bruit cadencé
Du lourd vaisseau, rampant sur l'onde avec des rames.

Ce sont des sacs pesants, d'où partent des sanglots.
On verrait, en sondant la mer qui les promène,
Se mouvoir dans leurs flancs comme une forme humaine... -
La lune était sereine et jouait sur les flots.

Victor Hugo (1802-1885) - Les Orientales

Poésie, calligraphie et peinture
En Chine, ces trois arts sont intimement liés et on les retrouve fréquemment, comme ici, sur le même support. Leur juxtaposition renforce l’émotion esthétique. Calligraphie et peinture naissent toutes deux de « l’Unique Trait du Pinceau ». Et tracer c’est déjà dire. Le même artiste sera souvent calligraphe, peintre et poète mettant « en écho les « images » de la poésie et celle qu’offre la contemplation d’un motif ». « Je parle avec ma main, tu écoutes avec tes yeux ; et nous nous comprenons, n’est ce pas d’un seul sourire. »

Dans son livre consacré à Shitao intitulé « La saveur du monde » (Edition Phébus), François Cheng nous présente une peinture où l’on peut voir une calligraphie du poème de Li Bai.


Shitao, Clair de lune sous la falaise

Il est intéressant de comparer la calligraphie de Weiyi en style Xingshu et celle de Shitao en style Lishu. Notons que la version calligraphiée par Shitao est légèrement différente de celle que nous vous présentons. Weiyi nous indique que cette dernière serait, d’après les recherches actuelles, plus proche du texte original.

Commentant la peinture et la poésie, François Cheng nous rappelle que Li Bai fut surnommé de son vivant « l’immortel banni du Ciel ». Pour lui, l’exil auquel font allusion le poème et la peinture ne sont pas seulement la séparation déjà si cruelle d’avec les siens, c’est aussi la conscience que nous ne sommes pas d’ici, qu’un lieu d’harmonie existe par delà la médiocrité des apparences. C’est la souffrance ressentie devant les misères du monde, la déchirure devant la perte de l’unité originelle et la recherche parfois désespérée d’une réconciliation, au moins pour quelques instants, avec nous même et avec le monde. Est-ce là folie ? « Non point chuchote la lune dissoute en brume lumineuse, familière des affaires terrestres…Que l’exilé daigne jeter un œil par-dessus la balustrade : le pays désiré est là, à portée de regard. Il peut même fermer les yeux : un cœur pur ne contient-il pas tous les mondes ?»

Françoise,
Weiyi,
Jean-Louis

A suivre…

vendredi 19 septembre 2008

Rencontre "Pensée chinoise et pensée occidentale"


Pensée chinoise et pensée occidentale
Rencontre « PhiloFnac » avec Laurence Vanin-Verna, Docteur en philosophie
mercredi 24 septembre à 16h30
Fnac Centre Bourse
Entrée libre

Olivier

mercredi 17 septembre 2008

Au sujet de 宋江 (Song Jiang) et du roman 水浒传 (Au bord de l'eau)


1. Résumé du roman水浒传"Au bord de l'eau"
宋江 Song Jiang est le personnage principal du roman "Au bord de l'eau". Celui ci est victime de grosses injustices de la part de potentats locaux et il ne voit pas d'autres issues que de se réfugier dans la clandestinité et devenir un rebelle. L'auteur du roman lui donnant d'indéniables qualités relationnelles, il va attirer à lui tous les personnages victimes comme lui d'injustices de la part du régime impérial. Sa troupe de rebelles finira par compter jusqu'à cent huit membres émérites. Réfugiés dans leur repaire inexpugnable des marais des Monts Liang 梁山泊dans le Shandong 山东ils recréent une société parallèle parfaitement organisée, véritable empire dans l'empire. L'empereur décide alors de les amnistier et les fait revenir à la capitale avec tous les honneurs. Connaissant la valeur guerrière de cette armée, il décide alors de nommer Song Jiang commandant en chef des troupes chargées de s'opposer aux invasions barbares. Dans les nombreuses batailles contre les barbares au Sud du pays, l'armée de Song Jiang est progressivement décimée. Song Jiang lui même finit empoisonné par des intrigants de la cour, mécontents que l'empereur ait amnistié des rebelles.

2. Les critiques de 宋江 Song Jiang
A. Des amis chinois
Ayant plusieurs fois discuté du roman "Au Bord de l'eau" avec des amis chinois, j'ai observé que beaucoup d'entre eux étaient très critiques vis-à-vis de "Song Jiang", le héros du roman. Certains soulignent son caractère hypocrite et lâche. Pour d'autres il a trahi la bande de rebelles qu'il avait si bien réunie. Pour d'autres encore, il a tué l'un se ses meilleurs compagnons Li Kui, le Tourbillon-noir. Bref, pour eux, c'est un personnage négatif. Nous allons voir que ces amis chinois se situent dans une lignée de critiques qui remonte au 17ème siècle.

B. Mao Zedong 毛泽东
Mao qui, avant d'être président a vécu une expérience un peu similaire à celle de Song Jiang a paraît il lu et relu le roman. Et bien sûr, ayant été jusqu'au bout de sa lutte en prenant le pouvoir en Chine, il a largement critiqué la fin du roman, en faisant porter la responsabilité de la déroute au personnage principal Song Jiang, qui lui n'a pas été jusqu'au bout. On imagine facilement que le pouvoir chinois, par fidélité à Mao, a continué jusqu'à nos jours à entretenir et diffuser cette critique du personnage.

C. Jin Sheng Tan 金圣叹
Il faut encore remonter plus loin encore dans le temps pour trouver l'origine de la critique du héros du roman. Et cette origine vient de l'un des auteurs du roman. On attribue en effet la rédaction de "Au bord de l'eau" à l'auteur 施耐庵, Shi Nai An, et son édition à 罗贯中, Luo Guan Zhong, au 14ème siècle. Luo Guan Zhong, celui là même qui a écrit "Le roman des trois royaumes", 三國演義, semble aussi avoir pris part à la rédaction du roman. Ce sont les auteurs de la version longue, celle là même qui est publiée dans la bibliothèque de la Pléiade. Au 17ème siècle, 金圣叹 Jin Sheng Tan, un écrivain à forte personnalité et passionné du roman "Au bord de l'eau", entreprend de le rééditer en lui adjoignant de nombreux commentaires mais aussi en révisant le style du roman. Mais il ne se borne pas à réviser le style. "Il bannit du titre le qualificatif "de loyauté et de justice" qu'il estime incompatible avec les agissements d'une bande de brigands et surtout il ampute l'œuvre de plusieurs dizaines de chapitres qui ne cadrent pas avec sa conception du livre. Car son dessein est de cristalliser sur le seul Song Jiang, sa bête noire, le coupable majeur en qui il voit le félon type et l'incarnation parfaite de la déloyauté et de l'injustice, la détestation universelle. On voit ici la complexité paradoxale de Jin Sheng Tan : penseur hétérodoxe, il va à rebours des opinions et des usages reçus en mettant sur un piédestal le roman "Au bord de l'eau" mais en vouant aux gémonies Song Jiang, coupable de trahison envers son souverain, il se fait le défenseur de l'orthodoxie morale confucéenne" (extrait de l'introduction au roman de J.Dars).
Cette complexité paradoxale, que décrit Jacques Dars à propos de Jin Sheng Tan, c'est exactement la même que je ressens vis-à-vis de mes amis chinois.

En fait ce qui s'oppose peut être ici ce sont deux points de vue.
Le premier point de vue que je qualifierais de "politique" (Jin Sheng Tan, Mao, mes amis chinois ?) veulent arrêter l'histoire à la victoire des bons sur les méchants. L'important est d'arriver au sommet (et d'y rester !). Et, comme souvent lorsque on est trop obnubilé par l'ennemi à abattre, on finit par l'imiter (théorie du modèle-obstacle).
Le second point de vue que je qualifierais de "humain" (Shi Nai An, Luo Guan Zhong) laisse entendre que derrière les combats et les luttes politiques, il y a aussi des êtres humains qui cherchent le bonheur, l'amour, l'harmonie, la sagesse. La dernière partie d'Au Bord de l'eau montre tous ces valeureux combattants à la recherche de sagesse soit dans une vie simple, soit dans la spiritualité. L'histoire ne s'arrête donc pas lorsque le méchant est à terre, elle continue, c'est peut être même là qu'elle commence vraiment.

3. La mort de 宋江 Song Jiang et de 李逵 Li Kui
Il me semble qu'une bonne illustration de ce qui a été dit ci dessus est le passage de la mort de Song Jiang et de Li Kui, son fidèle compagnon. Alors que la force de Song Jiang réside dans ses qualités relationnelles, celle de Li Kui est essentiellement physique. En bref, c'est une grosse brute mais il est d'une fidélité indéfectible envers Song Jiang. Ils forment un couple inséparable où Song Jiang est la tête et Li Kui les muscles. Combien de fois, Li Kui se retrouvant seul est amené à faire d'innombrables bêtises que toute la bande mettra beaucoup de temps et d'énergie à réparer. Li Kui demande pardon, Song Jiang le boude et lui fait la leçon mais au bout du compte, le couple se reforme.
A la fin du roman, se sachant empoisonné par des intrigants de la cour impériale, mais se refusant à accuser l'empereur, Song Jiang se demande comment va réagir Li Kui. Il le fait venir et il demande à Li Kui, qui ne sait pas encore que Song Jiang est empoisonné, comment il réagirait si il venait à apprendre que la cour avait empoisonné son grand frère. Li Kui immédiatement lui dit qu'il se révolterait contre la cour de l'empereur. Alors Song Jiang lui offre une coupe de vin. Aussitôt la coupe bue, Song Jiang, en versant une pluie de larmes, lui avoue qu'il vient de l'empoisonner. La réponse de Li Kui, à cette terrible nouvelle est la suivante : « C'est bon ! C'est bon ! De mon vivant, je me suis dévoué à votre service, grand frère. Eh bien ! Dans la mort, je continuerai à être un petit fantôme aux ordres de mon frère aîné ! ». Rentré chez lui, il donne ses instructions à ses suivants : « Lorsque je serai mort, dit il, ne manquez surtout pas de transporter mon cercueil au delà de la porte Sud de Chu-zhou, près de l'étang-aux-Persicaires, et de m'ensevelir à côté de mon grand frère ».
Ce passage, lorsque l'on a côtoyé les héros durant quelques deux mille pages, est d'une grande tristesse, d'une grande émotion mais aussi d'une grande beauté. Si, dans l'absolu, il s'agit bien d'un meurtre, je n'y vois pas là d'assassinat crapuleux. La tristesse de Song Jiang, l'acceptation par Li Kui du sort qui l'attend, la fidélité de Li Kui rend la situation beaucoup plus complexe et intéressante. C'est ce qu'a voulu nous communiquer l'auteur du roman, me semble-t-il.

4. Remarques
•La version de Jin Sheng Tan est celle qui est publiée chez Folio. Il y manque toute la fin du roman à partir de la reddition de Song Jiang. Il y manque aussi les très beaux passages de l'illumination de Lu Zhi Shen et de la mort de Song Jiang.
•La célèbre série TV reprend la version longue du roman. Elle prend toutefois des libertés par rapport au roman (notamment sur la mort de Song Jiang et Li Kui).
•Quelques soient les versions du roman, elles ont toutes été écrites en langage "vulgaire", langage méprisé par les mandarins, mais facilement compréhensible par le peuple et donc tout à fait approprié au thème de la révolte.

Olivier.

dimanche 14 septembre 2008

Chinafi à la journée des associations à Aix




Une journée riche en contact avec des personnes venues de tous les horizons : des Fançais, bien sûr, mais aussi des Américains, des Coréens, des Vietnamiens désireux de connaître la culture chinoise.
Nous avons, notamment, pris contact avec une association : Images de Ville qui organisera en novembre une manifestation à Aix consacrée à l'architecture urbaine chinoise et qui invitera pour l'occasion outre des architectes, des cinéastes, des écrivains, des chanteurs ...
A suivre donc ...
Jean-Louis


mardi 9 septembre 2008

VIVE LES RANDOS DE CHINAFI

Sainte Victoire
Le dimanche 16 octobre 2008
Croix de Provence par le sentier Imoucha (946m)
D’Aix-en-Provence, prendre la RD10 direction Vauvenargues;
Peu après St-Marc-Jaumegarde, prendre à droite la petite route goudronnée qui conduit au barrage de Bimont ;
Se garer au parking du barrage

Traverser le barrage de Bimont. Immédiatement après, tourner à gauche et suivre dès lors les marques de peinture bleue. Le tracé emprunte tour à tour des chemins forestiers puis des sentiers de plus en plus escarpés, mais le balisage est très régulier et permet de ne pas se perdre. La vue sur la face ouest de la Sainte Victoire est magnifique pendant la première moitié de l ascension. Vers la cote 860 m environ, le sentier rejoint le GR 9 en provenance de Vauvenargues : on accède alors très vite au site du prieuré : chapelle ouverte certains jours, abri-refuge ... jeter un coup d’oeil prudent à la brèche des moines! Il reste alors 50 m à grimper, toujours sur le GR , pour atteindre la Croix de Provence (946 m) d' où la vue est extraordinaire sur tous les massifs Provençaux, l' Etang de Berre par temps clair, le massif des Ecrins .
Il existe plus facile (le GR 9) , plus rapide (les sentiers rouges au sud), mais le sentier Imoucha reste le plus varié, le plus progressif et celui qui permet de jouir des points de vue les plus élégants sur la grande dame de Provence . Retour par le même chemin, après un pique nique bien arrosé de thé ou de… !!

RENDEZ VOUS SOIT A 8H30 AU METRO LA ROSE
SOIT A 9H30 AU PARKING DU BARRAGE
Comme d’habitude bien se chausser, ici c’est impératif (merci de ne pas venir en chaussures de ville)

lundi 8 septembre 2008

Ji Zu, Le Culte des Ancêtres

On pourrait, sans doute, à partir de n’importe que sujet, aborder la plupart des aspects de la culture chinoise.
En croisant différents textes consacrés au Culte des Ancêtres, on s’aperçoit que cette pratique religieuse nous permet de mieux comprendre :
- l’importance de la piété filiale et de la structure familiale qui va servir de modèle d’organisation à la société et à la vie politique.
- la perméabilité entre la sphère du monde naturel et le surnaturel, mais aussi entre le religieux et le politique.
- les raisons de l’absence de véritable mythologie dans la culture chinoise
- pourquoi la notion de création qui tient une place si importante dans la pensée occidentale est remplacée par celle de processus dans la culture chinoise
- l’importance des rites et les différences d’interprétation que l’on peut en avoir qui fut à l’origine de la fameuse querelle des rites entre les jésuites et la papauté.

Cet article trouve ses sources dans :
- Introduction à la pensée chinoise de Nicolas Zufferey
- L’article de C.J.D. Javary dans le monde des religions
- Histoire de la pensée chinoise d’Anne Cheng
- Procès et création de François Jullien
- Le Rêve dans le Pavillon Rouge

Le Culte des Ancêtres : un prolongement de la piété filiale.
Il est intéressant de constater que l’on assiste, au cours des âges, à un renversement complet dans la conception des rapports entre les vivants et les défunts.
Dans la Haute Antiquité, les défunts sont perçus comme des « esprits » de nature analogue aux divinités animistes qui président aux différents phénomènes naturels. Les hommes sont à leur merci.
Plus tard, la civilisation chinoise s’organise selon une structure familiale et féodale. Le Culte des Ancêtres devient un prolongement de la piété filiale et le fondement spirituel de la morale d’Etat. Désormais ce sont les défunts qui dépendent des vivants et non le contraire. Le devoir premier de la piété filiale consiste à nourrir et entretenir ses parents devenus trop vieux pour y pourvoir par eux-mêmes. Et cette obligation se poursuit au-delà de leur vivant. Il faut d’abord leur donner au moins un descendant qui va poursuivre à son tour le rituel, mais aussi contribuer à assurer leur bien être dans le monde invisible où ils demeurent après la mort.
Dans cette optique, le Culte des Ancêtres se fait sous forme d’offrandes dont ils ne goûtent que la part subtile (la part matérielle est ensuite dégustée en famille) et de substituts en papier d’objets et d’argents factices que l’on fait brûler, puisque le feu a le pouvoir de traverser les mondes sans altérer la substance des choses.

L’absence de frontière entre le monde naturel et le surnaturel.
Les Ancêtres maintiennent onc un lien organique avec leur descendance vivante.
En tant que membre d’une communauté familiale et par delà la frontière entre la vie et la mort, ils continuent à jouer un rôle au sein de cette communauté, et leur statut dans la parenté garde toute son importance.
Comme la divination, le Culte des Ancêtres présuppose qu’il n’existe pas de coupure essentielle entre le monde des vivants et le monde surnaturel : les Ancêtres servent de lien entre les deux ordres, par exemple en intervenant pour les vivants auprès des forces surnaturelles.

L’autel ancestral et les tablettes ne symbolisent pas seulement les Ancêtres, ils signalent également que ces derniers appartiennent encore à la famille.
On retrouve ici, la défiance de la pensée chinoise envers les oppositions tranchées, défiance qui est un corollaire de la conception des contraires complémentaires.

L’importance de la structure familiale.
Le culte n’est pas dirigé par un prêtre mais par le chef de famille qui exprime ainsi son pouvoir et sa légitimité.
En temps même que phénomène religieux, le Culte des Ancêtres manifeste le groupe de parenté comme paradigme de l’organisation sociale, et c’est sans doute pour cette raison que, au-delà, de sa fonction proprement religieuse, il a contribué à l’laboration de l’ordre sociopolitique en Chine.
On se souvient qu’en chinois, pays se dit « guo jia », pays famille et que, même si l’n a pas de lien de parenté, on se salue par « oncle », « petit frère », « grande sœur ».

Pas de véritable mythologie.
Plus qu’un esprit de l’au-delà, l’Ancêtre représente d’abord un statut, un rôle familial dans lequel il se fond presque au point de perdre toute histoire personnelle, tout destin individuel. Il se trouve donc doté d’un potentiel mythique assez réduit, et la relative pauvreté des mythes dans la culture chinoise pourrait bien s’expliquer par la nature même du culte ancestral.

La place centrale de l’harmonie.
Au lieu d’être doués d’une volonté arbitraire, voire capricieuse, l’Ancêtre est donc d’emblé perçu à travers son statut et intégré dans la vision d’un ordre familial fondé sur l’harmonie.
On se souvient que la notion d’harmonie, dans la culture chinoise, tient la place centrale occupée par la liberté dans la notre, au moins depuis le siècle des Lumières.
Les Chinois, peuples de cultivateurs et non d’éleveurs auraient été plus attentifs à l’influence diffuse qui émane du cycle des saisons. L’intervention de l’homme - commandement et contrainte – serait au contraire indispensable dans le rapport de l’homme avec l’animal, tel que l’on vécu les anciennes civilisations pastorales. Comme le rappelle Jacques Gernet en résumant la thèse d’Haudricourt : le Dieu des Juifs et des Chrétiens est un Dieu de pasteurs qui parle, commande, exige. Le Ciel des Chinois ne parle pas. Il se contente de produire les saisons et d’agir de façon continue par ses influx saisonniers.

Procès et Création.
La prédominance du Culte des Ancêtres dans la Chine antique a donné lieu à une représentation cosmogonique fondée sur un modèle organique d’engendrement bien plus que sur celui d’une création ex nihilo par une puissance transcendante. L’Ancêtre n’apparaît pas comme une toute puissance créatrice mais comme une instance d’ordre jouant un rôle axial entre le monde cosmique constitué d’énergies en interaction harmonieuse et le monde sociopolitique humain régit par des relations de type familial et par des codes de comportement rituel.

L’importance des rites, le religieux au service du politique.
En tant que cérémonial, le Culte des Ancêtres obéit à une organisation, une distribution des rôles. Bien effectué, le rite possède une harmonie et une efficace considérée comme fondamentale pour ses effets positifs. Le rite contribue à l’harmonie de la famille, de la société et du monde. (Voir article sur les deux homophones Li).

La querelle des rites.
Elle traduit un des malentendus les plus flagrants entre chrétiens européens et lettrés chinois.
Il s’agit de savoir si les rites sont d’ordre religieux ou non. Si oui, ils ne peuvent être aux yeux de la papauté que superstitions et partant incompatibles avec le christianisme ; dans le cas contraire, ils sont compatibles avec la foi chrétienne.
Pour les Chinois la question n’a pas grand sens du fait de l’absence de distinction dans la tradition chinoise entre religieux et civil, sacré et profane, spirituel et temporel.
Au XVIII° la papauté estimera le Culte des Ancêtres incompatible avec le catholicisme, les jésuites au contraire conseilleront de le tolérer. Cette intransigeance de la papauté fut sans doute un frein à l’expansion du christianisme en Chine.

Le Rêve dans le Pavillon Rouge nous fournit un bel exemple de l’ordonnancement des rites lors d’une cérémonie consacrée au Culte des Ancêtres. Je ne peux en citer qu’un court extrait. Je renvoie le lecteur qui souhaiterait lire ce très beau texte à l’édition de la Pléiade, pages 1241 à 1245.
« Le rôle du maître officiant était tenu par Jia le Déférent. Jia le Clément l’assistait. Jia Joyau de Jade présentait les coupes. Jia Vase de Jade et Jia Jade d’Oblation présentaient les rouleaux de soie. Le frérot Jade présentait les faisceaux de baguettes d’encens. Jia l’Acore et Jia la Corniole étendaient les tapis de prière et veillaient sur le brasier. Soudain, les musiciens vêtus de robes vertes commencèrent à jouer. Trois fois fut faite l’offrande des coupes, trois fois suivies des salutations rituelles. Les rouleaux de soie furent consumés, et les libations offertes. Les rites ainsi dûment accomplis, la musique cessa, toute l’assemblée se retira et fit cortège à l’Aïeule jusqu’à la salle de cérémonie du logis principal, pour la présentation des offrandes aux portraits des Ancêtres. »

A suivre,

Jean-Louis

jeudi 4 septembre 2008

lotus à perte de vue

Voilà les lotus de ma province, dans la ville de "Hong Hu" , l'endroit le plus réputé pour ses lotus.
Les fruits de lotus étaient délicieux, dommage qu'on ne peut pas en trouver en France.....


mardi 2 septembre 2008

Comédies et proverbes (suite)



Soleil, marche, baignade et les bonnes glaces que nous avons dégustées au retour...
La bonne humeur était de rigueur, à tel point qu'elle s'est communiquée à la conductrice de notre car (que nous avons emprunté sur le chemin du retour seulement..)qui nous a pris en photo. Nous avons entonné notre grand succès : "wo shi yii ge zhong guo ren..." au grand ébahissement des autres passagers.
Merci Nicole, merci Chinafi pour ces bons souvenirs...
Le photographe en chef