mardi 20 octobre 2015
Après les soutenances ....la fête
Nos amis étudiants de la chorale soutenaient aujourd'hui leur mémoire de fin d'études.
Aussi, ce soir les soutenances terminées, quel soulagement ! Nous avons dignement fêté cet événement autour du verre de l'amitié et nous avons chanté quelques unes des chansons qui ont marqué cette année
Ce fut aussi l'occasion de dire au revoir à ceux qui vont rentrer en Chine. Une équipe bien sympathique !
A tous nos meilleurs vœux de réussite et de bonheur.
Jean-Louis
samedi 17 octobre 2015
Pensée mythique et pensée chinoise
Lorsque Claude Lévi-Strauss était en poste à New-York comme attaché culturel, il fréquenta beaucoup les milieux surréalistes. Il leur emprunta certainement le goût des rapprochements insolites, innattendus. Ainsi il disait redécouvrir Florence en visitant New-York. Un peu de cette manière, je vous propose, aujourd'hui d'aborder certains aspects de la pensée chinoise en "visitant" les mythes des indiens d'Amérique. Cela peut sembler, à première vue, paradoxal. En effet, selon Anne Cheng, on constate "la pauvreté des mythes de la Chine ancienne, du moins tels qu’ils nous sont parvenus » Histoire de la pensée chinoise P.55
Pourtant,
il me semble que, malgré leurs évidentes différences, on peut relever des
points de convergence entre la pensée mythique amérindienne et la pensée
chinoise classique.
Ces
points de convergence trouvent, sans doute, leur origine dans la recherche ou
dans la nostalgie de l’unité du monde.
Dans
la pensée mythique, cette nostalgie de l’unité du monde trouve son expression
dans la définition même du mythe : « une histoire du temps où les
hommes et les animaux n’étaient pas encore distincts ». Claude
Lévi-Strauss, De près et de loin
Pour
la pensée chinoise « l’unité recherchée …tout au long de son histoire est
celle même du souffle (qi), influx ou énergie vitale qui anime l’univers
entier….A la fois esprit et matière, le souffle assure la cohérence organique
de l’ordre des vivants à tous les niveaux. » Anne Cheng ibidem.
Cette
recherche ou cette nostalgie de l’unité du monde entraine, me semble t-il, des
points de convergence entre la pensée mythique et la pensée chinoise à trois
niveaux :
-
Une tendance à des explications
englobant la totalité des phénomènes
-
Une tentative pour dépasser l’opposition
entre le sensible et l’intelligible
-
La primauté accordée à la relation.
-
Une tendance à des explications
englobant la totalité des phénomènes
Pour
Claude Lévi-Strauss l’esprit des mythes consiste « à l’opposé de la
méthode cartésienne, par un refus de diviser la difficulté, ne jamais accepter
de réponse partielle, aspirer à des explications englobant la totalité des
phénomènes. Le propre du mythe, c’est confronté à un problème, de le penser
comme l’homologue d’autres problèmes qui se posent sur d’autres plans :
cosmologique, physique, morale, juridique et social …Et de rendre compte de
tous ensemble. » De près et de loin,
Editions Odile Jacob. Ainsi, par exemple, un mythe
expliquera pourquoi le soleil ne doit pas se trouver trop près de la terre car
alors la chaleur serait excessive ni trop loin car les hommes périraient de
froid. Cette bonne distance doit se retrouver dans les règles du mariage. Un
homme ne doit pas chercher une femme trop loin de son clan car il risquerait d’épouser
une ennemie, voire une sorcière, ni trop près car il commettrait un inceste.
De
la même manière dans la pensée chinoise « L’harmonie qui prévaut dans le
cours naturel des choses est à maintenir dans l’existence et les relations
humaines » Anne Cheng, ibidem P. 38
-
Une tentative pour dépasser
l’opposition entre le sensible et l’intelligible
« Si
la science moderne a pu se constituer, c’est au prix d’une rupture entre les
deux ordres, entre ce qu’au XVII° siècle on appelait les qualités secondes – c’est
à dire les données de la sensibilité : couleurs, saveurs, bruits, textures
– et les qualités premières non tributaires des sens, qui constituent la vraie
réalité. Or, il me semblait que la pensée des peuples dits « sauvages »,
restée rebelle à cette distinction, menait toute sa réflexion au niveau des
qualités sensibles et parvenait néanmoins à construire sur cette seule base une
vision du monde non dépourvue de cohérence ni de logique. Et aussi, plus
efficace qu’on n’a coutume de le croire ». CLS, ibidem P. 155.
La
pensée chinoise est restée elle aussi « rebelle » à la distinction
entre l’ordre sensible et l’ordre intelligible. Des notions comme le yin (l'humide, le principe féminin ....) et le
yang (le sec, le principe masculin ...) ou encore le souffle appartiennent autant à l’ordre sensible qu’à l’ordre
intelligible.
-
La primauté accordée à la relation.
Pour
Lévi-Strauss un mythe, un masque indien, d’une manière générale un phénomène
quelconque ne peuvent jamais s'interpréter en eux-mêmes et par eux-mêmes, comme
des objets séparés. Ils ne peuvent se comprendre, ils n’existent que dans les
relations qu’ils entretiennent avec d’autres mythes, d’autres masques, d’autres
phénomènes de même nature.
Anne
Cheng dit sensiblement la même chose quand elle évoque la réflexion chinoise
sur la relation : « celle-ci n’est pas comprise comme un simple lien
venant s’établir entre des entités préalablement distinctes, elle est
constitutive des êtres dans leur existence et leur devenir ». Ibidem P. 41
On
pourrait évoquer encore d’autres points de convergence entre la pensée chinoise
et cette fois le structuralisme, par exemple l’effacement de la notion de
sujet.
Il
semble intéressant de constater que la recherche de l’unité du monde transposée
dans des contextes et des modes de pensées très différents produit des ensembles
présentant la même cohérence.
Jean-Louis
jeudi 8 octobre 2015
Brassens et Confucius
Lundi
dernier France3 diffusait, dans le cadre de la série Lundi en histoires, une émission consacrée à Georges Brassens. Cette
émission ne nous apprenait pas grand-chose sur le chanteur, elle contenait
néanmoins quelques images d’archives intéressantes, l’interprétation originale de Putain de toi par Olivia Ruiz et une interview de Maxime
Le Forestier qui citait une phrase de Pierre Desproges « les chansons de
Brassens sont un vaccin contre la connerie, mais il faut pas mal de rappels ».
Sans
cesse Brassens nous rappelle que la vie est complexe, contradictoire, parfois
paradoxale. Il nous apprend à nous méfier des simplifications hâtives et des
jugements à l’emporte-pièce. Celui qui a écrit « Il y a les emmerdantes…les
emmerdeuses …et les emmerderesses » a aussi chanté Le blason et Quatre vingt
quinze fois sur cent. Le chanteur qui n’a pas cessé de crier « mort
aux vaches » confie à un « flic bien singulier » le soin de
recouvrir de sa pèlerine l’ivrogne tombé à terre (L’épave). « L’anticlérical fanatique » comptait parmi ses
amis un bon nombre d’ecclésiastiques. Pour lui les « Évangiles n’étaient
pas de l’hébreu » puisqu' il les connaissait sur le bout des doigts et il
met dans la bouche d’un curé une de ses convictions les plus viscérales :
« Mort
à toute peine de mort », La messe au
Pendu
A
un de ses amis, le Père André Sève, il confie son désaccord sur la réforme de
Vatican II :
« Vous
ne semblez pas penser aux êtres à qui on a pas donné assez de force pour juger
par eux-mêmes, pour affronter la foie nue, sans revêtements de mystères, de
rites. Vous parlez beaucoup de pauvres, mais vous ne semblez pas penser à cette
pauvreté : les gens pauvres en pouvoir de réflexion et d’expression. Ils
disaient tout ce qu’ils pouvaient dire en mettant un cierge. Ils avaient une
idée du prêtre rien qu’en voyant sa soutane, ils sentaient un mystère en entendant
le latin ».
Brassens reprend ces thèmes dans la chanson Tempête dans un bénitier. Même si cette chanson a été écrite « pour rigoler », elle peut nous conduire à nous interroger sur la signification des rites. Bien sûr, la lecture de Confucius et d’Anne Cheng (Histoire de la pensée chinoise P. 73 et suivantes) enrichira notre réflexion. Les rites ont, non seulement une dimension magique et esthétique, mais ils nous relient également aux générations qui nous ont précédés, à notre culture. Ils humanisent les comportements en société et en cela sont, paradoxalement peut-être, un rempart contre le fanatisme et l’intégrisme. Comme le montrent aussi bien Brassens que Confucius, les rites et la tradition ne sont pas incompatibles avec une pensée non pas moderne, ce qui ne veut pas dire grand-chose, mais intemporelle qui nous concerne quelque soit les époques.
Brassens reprend ces thèmes dans la chanson Tempête dans un bénitier. Même si cette chanson a été écrite « pour rigoler », elle peut nous conduire à nous interroger sur la signification des rites. Bien sûr, la lecture de Confucius et d’Anne Cheng (Histoire de la pensée chinoise P. 73 et suivantes) enrichira notre réflexion. Les rites ont, non seulement une dimension magique et esthétique, mais ils nous relient également aux générations qui nous ont précédés, à notre culture. Ils humanisent les comportements en société et en cela sont, paradoxalement peut-être, un rempart contre le fanatisme et l’intégrisme. Comme le montrent aussi bien Brassens que Confucius, les rites et la tradition ne sont pas incompatibles avec une pensée non pas moderne, ce qui ne veut pas dire grand-chose, mais intemporelle qui nous concerne quelque soit les époques.
Voici
une chanson qui aurait peut-être amusé Confucius.
Jean-Louis
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