mardi 15 janvier 2008

Leçons sur Zhuangzi.

Ce livre reprend quatre conférences données au collège de France. Zhuangzi est l’un des grands philosophes de l’antiquité chinoise (300 avant notre ère). Le texte de Zhuangzi est réputé très difficile y compris par les chinois eux mêmes. Billeter en propose une traduction neuve et indépendante des nombreux commentaires qui en ont été fait.

Leçon 1 : le fonctionnement des choses

Les trois bases principales du travail de Billeter sur Zhuangzi sont les suivantes :
• C’est essentiellement un travail de traduction.
• Celle-ci est faite dans l’esprit suivant : Zhuangzi prend pour objet de sa pensée l’expérience qu’il a de lui-même. Ceci a pour conséquence d’instaurer une égalité de principe entre Zhuangzi et Billeter.
• Billeter fait l’hypothèse que les écrits de Zhuangzi sont moins des explications que des descriptions et que ces descriptions concernent « l’infiniment proche, le presque immédiat ».

Billeter prend l’exemple du cuisinier Ting qui dépèce un bœuf. Pour Billeter, Zhuangzi décrit des phases d’un apprentissage de geste et c’est dans cet esprit qu’il le traduit. Le texte perd toute son obscurité et de plus il est universel car chaque homme passe par ces phases d’apprentissage de gestes.

Billeter prend un second exemple, celui d’un charron qui taille une roue. Dans ce texte, Zhuangzi évoque l’impossibilité pour l’expert d’un geste de transmettre son expertise par le langage. Le langage peut jouer un rôle dans l’apprentissage, mais l’apprentissage ne peut être qu’une démarche personnelle. Selon Billeter, la philosophie n’a jamais pris en compte cette connaissance qu’implique le geste d’un expert car celle-ci n’est pas de nature discursive, qu’elle est trop familière pour être digne d’intérêt et qu’un tel geste pratiqué quotidiennement devient inconscient.
La phrase très connue de Zhuangzi «celui qui sait ne parle pas, celui qui parle ne sait pas» est traduite par Billeter par «quand on perçoit, on ne parle pas et quand on parle, on ne perçoit pas» pour rendre compte du fait que le langage gêne la perception et la perception se fait mieux sans le langage. Cette description, que tout à chacun reconnaît, se comprend aisément car Billeter choisit de traduire le terme chinois «知 zhi» par la «perception» au lieu du «savoir».

Le troisième texte de Zhuangzi que prend Billeter est celui d’un nageur expert. Ce dernier n’explique pas sa méthode mais décrit son expérience en utilisant les trois termes chinois de gou, xing et ming que Billeter traduit par «le donné» (je suis né dans ces collines), «le naturel» (j’ai grandi dans l’eau) et «nécessité» (j’ignore pourquoi j’agis comme je fais).

Billeter pense qu’il a raison de traduire le Zhuangzi de cette manière pour trois raisons :
• Le texte traduit a un effet d’ensemble.
• Ce qui est exprimé dans un texte se trouve confirmé dans d’autres parties de l’œuvre.
• Les textes sont conformes avec l’expérience (substrat familier de nos activités conscientes)

Une des conséquences est que le fond de ces textes n’est pas spécifiquement chinois. Billeter dans ses traductions évite d’ailleurs de faire croire au lecteur qu’il est en présence de quelque chose de typiquement chinois. Par exemple le terme «dao 道» est traduit par divers termes selon le contexte (technique, fonctionnement des choses, méthode, etc.)

Après ces textes sur les stades de l’apprentissage, sur le caractère non transmissible du geste, sur l’activité spontanée comme aboutissement d’un exercice méthodique, Billeter se propose par la suite d’étudier des textes plus difficiles qui examinent les moments de notre expérience qui échappent à notre attention.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci Olivier pour ce résumé d'un texte relativement difficile.
Petit à petit nous allons arriver au coeur du débat.
Patience...
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Jean-Louis

Cochonfucius a dit…
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.