Les arguments des deux débatteurs ayant été exposés, il est temps maintenant de présenter quelques réflexions que m’inspirent ces lectures.
1. Introduction
Vers la fin du 19ème siècle, l’imposition à la Chine par l’occident tout puissant de sa puissance économique et commerciale a entraîné tout un débat dans le monde intellectuel chinois, révélant sa fascination pour les valeurs occidentales et son désir de les importer en Chine. . S’en suivront un certain nombre de mouvements (Taiping 太平, le Zi Qiang 自强, Le Fu Qiang 富强, les 100 jours 戊戌变法) qui aboutiront finalement à la chute de l’empire. Un des slogans du mouvement du 4 mai (五四运动) n’était il pas : « la Chine est malade, il faut inviter deux grands monsieurs de l’occident à son chevet: 德先生 De Xiansheng (Monsieur Démocratie) et 赛先生 Sai Xiansheng (Monsieur Science).
J’observe que c’est un peu le même phénomène qui se répète à la fin du 20ème siècle où c’est la Chine qui cette fois impose sa puissance économique et on assiste à l’identique à une certaine fascination des occidentaux (intellectuels, chefs d’entreprise) pour le monde chinois, la pensée chinoise. Les messages de ce blog en sont aussi une illustration.
Toutefois, vu du 21e siècle, ce débat sur l’altérité peut sembler un peu dépassé.
En effet, les deux mondes chinois et occidental qui s’ignoraient jusqu’au 16ème siècle, qui se côtoyaient jusqu’au 19ème siècle, s’interpénètrent depuis le 19ème siècle. Le monde chinois s’est maintenant occidentalisé. Les concepts occidentaux ont été traduits dans la langue chinoise (vérité, philosophie, temps, nature, liberté) les modèles occidentaux (marxisme, olympisme, etc.) ont été importés. De même le monde occidental s’est orientalisé. Il n’y a qu’à voir la science du 20ème siècle avec des théories qui s’expriment par des discours sur le temps, l’espace, le vide, la forme et qui ont des résonances très orientales. De même l’art occidental du 20ème siècle. De même l’influence en occident des religions orientales, et des pratiques corporelles attenantes (yoga, tai ji quan, qi gong etc.). Beaucoup, dans le débat actuel, oublient encore cette interpénétration des pensées et présentent une pensée occidentale n’ayant pas dépassé le stade grec ou le stade cartésien.
Est-ce à dire que tout s’est unifié ? Jullien pense que cette uniformisation tend à enfouir des formes de pensée et qu’il y aurait danger à les recouvrir trop hâtivement. Mais précisément n’est ce pas là ce que font des sinologues comme Billeter qui grâce à leur savoir en langue ancienne permettent de nous faire découvrir des auteurs comme Zhuangzi ?
Dans son livre « Chemin faisant » Jullien explique que son travail consiste d’une part à partir d’un questionnement (« sans questionnement l’érudition reste stérile ») et d’autre part à faire travailler un écart de pensées pour mieux appréhender le questionnement du départ (« il faut sortir de son confort intellectuel et aller voir d’autres ailleurs »).
C’est un peu cette méthode que j’ai voulu reprendre, en toute modestie, à savoir partir d’un questionnement sur l’altérité et faire travailler l’écart entre les pensées de Jullien et de Billeter.
Olivier
mardi 18 mars 2008
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