dimanche 1 juin 2008

Les Entretiens "Etudier sans me lasser et enseigner sans relâche"


Lorsque je demandai à Weiyi une calligraphie pour illustrer un article sur l’enseignement, sur la transmission du savoir, elle me proposa une série de citations extraites des « Entretiens » de Confucius. C’était, je crois, une bonne idée car Confucius fut avant tout un maître et sa pensée réside dans son enseignement.
Soif d’apprendre, passion de transmettre ses connaissances.
« A quinze ans, je résolus d’apprendre… »

Toutes les occasions sont bonnes pour étancher cette soif. Une promenade entre amis, par exemple :
"Le Maître dit « Quand on se promène ne serait-ce qu’à trois, chacun est certain de trouver en l’autre un maître, faisant la part du bon pour l’imiter et du mauvais pour le corriger en lui-même » VII, 21 Traduction par Anne Cheng de la calligraphie en tête de cet article.

A quoi fait écho une autre citation des Entretiens :
Le Maître dit: «Quand vous voyez un homme sage, pensez à l'égaler en vertu.Quand vous voyez un homme dépourvu de sagesse,examinez-vous vous-même.» IV, 17

L’éducation n’est pas seulement livresque (même si l’étude des textes anciens est fondamentale), elle fait la part belle à l’observation.
Sa visée est avant tout pratique (l’important est de « savoir comment » plutôt que de « savoir que »), car l’enseignement de Confucius repose sur l’idée que la nature humaine est éminemment perfectible. Il s’agit de « nourrir la vie », d’apprendre à vivre pour devenir un homme de bien qui servira son prince comme son père.
« L’étude vaut pour soi-même, un soi même engagé dans une pratique politique, que ce soit au niveau familial ou à l’échelle d’un royaume » Béatrice L’Haridon.

« C’est ainsi que s’esquisse, d’entrée de jeu, le destin « politique » (au sens large) de l’homme éduqué qui, au lieu de se tenir en retrait pour mieux remplir un rôle de conscience critique, se sent au contraire la responsabilité de s’engager dans le processus d’harmonisation de la communauté humaine » Anne Cheng

Ainsi s’explique que les poètes, les artistes, les « penseurs chinois », ont très souvent été également des hommes politiques.

Apprendre et transmettre son savoir sont source d’une grande joie. Car ces deux actions sont placées sous le signe du partage. Confucius l’a bien vu qui rapproche dans la première phrase des entretiens « l’apprendre » et l’amitié.

"Apprendre quelque chose pour pouvoir le vivre à tout moment, n’est-ce pas là source de grand plaisir ? Recevoir un ami qui vient de loin, n’est-ce pas la plus grande joie ? Etre méconnu des hommes sans en prendre ombrage, n’est-ce pas le fait de l’homme de bien" Entretiens (I.1)


A suivre,
Jean-Louis

Cet article s’inspire du livre d’Anne Cheng « Histoire de la pensée chinoise » et d’un article de Béatrice L’Haridon : « Les Entretiens » paru dans le numéro spécial du Point consacrés aux textes fondateurs de la pensée chinoise.

Dans la calligraphie regardez les variations d’écriture des caractères semblables (2ème caractère de 3 ème colonne et 3 ème caractère de la 4 ème colonne, 4 ème caractère de la 3ème colonne et dernier caractère de la 4 ème colonne, 2ème caractère de 4ème colonne et dernier caractère de la 5 ème colonne). Ces variations sont introduites pour accentuer l’effet de diversité.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

comme d'hab j'ai plein de questions
et de remarques
mais c'est normal puiqu'amitié et apprendre ne font qu'un
donc je voudrais que tu m'expliques ce que veut dire :
"Etre méconnu des hommes sans en prendre ombrage, n’est-ce pas le fait de l’homme de bien"

sinon le reste ça va

toutefois c'est marrant pour la numérotation des colonnes tu as commencé par la droite et ça m'a déstabilisé mais après j'ai compris

au fait B L'HARIDON est ce une parente de notre chère Françoise ?

Anonyme a dit…

j'ai particulièment apprécié cet extrait :
"la nature humaine est éminemment perfectible."
en ces temps de tension ce positivisme est encourageant
il correspond à mon point de vue

Nicole

Anonyme a dit…

Merci Nicole pour tes questions qui permettent de présiser certains points.
La tradition rapporte que la passion de Confucius pour les études lui faisait oublier les plaisirs de la table et la vieillesse qui approchait. Anne Cheng précise que pour Confucius « l’apprendre est une expérience qui se pratique, qui se partage avec autrui et qui est source de joie, en elle-même et pour elle-même…L’apprendre trouve donc sa justification en soi, et implique l’acceptation de « rester méconnu des hommes sans en prendre ombrage ».
On comprend mieux cette phrase lorsque l’on sait que Confucius quitta les fonctions officielles qu’il occupaient dans son pays natal, le royaume de Lu, déçu par le mauvais gouvernement de son souverain Il alla proposer ses conseils à d’autres, sans grand succès semble-t-il. « Confucius est connu parmi ses contemporains comme celui qui s’obstine à vouloir sauver le monde, tout en sachant que c’est peine perdue ».

Chère Nicole, pour répondre à ta deuxième question, j’espère que Françoise (dont la modestie égale celle de Confucius) ne m’en voudra pas de révéler que Béatrice L’Haridon est sa fille.

Enfin, la calligraphie écrite selon la composition ancienne se lit de haut en bas et de droite à gauche. Les deux dernières colonnes représentent la signature où sont en général indiqués le nom de l’auteur du texte, le nom de la calligraphe et les circonstances de la composition lieu, date et parfois commanditaire de l’œuvre.

Jean-Louis

Anonyme a dit…

sous cet éclairage je comprends fort bien : "être méconnu..."

merci pour toutes ces explications

Nicole

Anonyme a dit…

Merci Jean Louis pour ce message dont le sujet m'est cher.
Olivier