samedi 20 septembre 2014

J'ai tant rêvé de toi

L’être aimé a inspiré les rêves des poètes chinois, français et certainement de tous les pays.

 Je vous propose  une série d’articles sur ce thème qui  permettront de présenter quelques beaux poèmes chinois et français. Pour ce premier article, j’ai choisi  un poème de Su Shi et un poème de Robert Desnos. Si vous connaissez quelques poèmes sur ce thème n’hésitez pas à les publier ou à me les communiquer. Je les publierai bien volontiers.

 Le poème chinois
On ne présente plus Su Shi (1037  - 1101) aux lecteurs du blog.

Le poème présenté aujourd'hui a été écrit 10 ans après la disparition de sa première épouse morte à 26 ans. La jeune femme viendra souvent visiter le poéte dans ses rêves.

La traduction du poème est de Claude Roy (in Un ami qui nous venait de l’an mil)






Dix ans    vivante effacée    séparée de moi
Je n’essaie pas de me souvenir
Mais oublier est difficile
La  tombe solitaire à des milliers de li
A qui parler de mes pensées ?
Si nous nous retrouvions
Vous ne me reconnaîtriez pas
Poussière sur mon visage
Gelée blanche sur mes cheveux

 Cette nuit j’ai rêvé    Je suis à la maison
Vous êtes près de la fenêtre de la petite chambre
Vous brossez vos cheveux
Les larmes coulent sur vos joues
Est-ce que mon cœur aura souffrance
Ainsi année après année ?
La tombe au clair de lune
L’ombre des pins que j’ai plantés 

Le poème français est de Robert Desnos.
 Je n’aurai pas la prétention de présenter ce poète. Je préfère laisser le soin à Aragon de l’évoquer dans un beau poème mis en musique par Jean Ferrat.

  

Le poème de Desnos présenté ci-dessous lui a été inspiré par la chanteuse Yvonne George qu'il aima d’un amour non partagé. Le poète évoque merveilleusement l’aura de mystère et d’inaccessibilité qui entoure l’être aimé ;

J’ai tant rêvé de toi
J’ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.
Est-il encore temps d’atteindre ce corps vivant et de baiser sur cette bouche la naissance de la voix qui m’est chère ?
J’ai tant rêvé de toi que mes bras habitués, en étreignant ton ombre, à se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas au contour de ton corps, peut-être.
Et que devant l’apparence réelle de ce qui me hante et me gouverne depuis des jours et des années, je deviendrais une ombre sans doute.

Ô balances sentimentales.

J’ai tant rêvé de toi qu’il n’est plus temps sans doute que je m’éveille. Je dors debout, le corps exposé à toutes les apparences de la vie et de l’amour et toi, la seule qui compte aujourd’hui pour moi, je pourrais moins toucher ton front et tes lèvres que les premières lèvres et les premiers fronts venus.

J’ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé, couché avec ton fantôme qu’il ne me reste plus peut-être, et pourtant, qu’à être fantôme parmi les fantômes et plus ombre cent fois que l’ombre qui se promène et se promènera allègrement sur le cadran solaire de ta vie.

                        Robert Desnos, A la mystérieuse, 1926   



Sur une musique d'Edward Elgar




Mis en chanson par Michel Corringe




Jean-Louis 

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