Temps
pluvieux, brumeux. Pas de doute c’est bien l’automne. A chaque saison ses
traditions et ses plaisirs. C’est
aujourd’hui la Sainte Barbe. N’oubliez pas de planter votre blé dans trois
coupelles en rappel de la trinité.
A
chaque saison ses traditions mais aussi ses poèmes. Les éditions Moudarren ont eu l’excellente idée de publier un recueil de poèmes chinois pour chaque saison
(On peut les trouver à l’Alcazar). Ces poèmes sont illustrés de belles
calligraphies. Le poème chinois que je vous présente aujourd’hui est de Yang
Wan Li, un poète de la dynaste des Song. Comme poème français j’ai choisi Les colchiques de Guillaume Apollinaire car il contient une petite énigme qui nous conduira à nous poser cette question : faut-il expliquer un poème ?
Le poème chinois
Le bananier de Yang Wan
Li
Quand
le bananier rencontre la pluie aussitôt il se réjouit
Toute
la nuit il produit un son clair, joli de surcroît
Les
notes aigües imitent ingénieusement les mouches heurtant le papier
Les
notes graves résonnent comme une source descendant la montagne
Trois
gouttes, cinq gouttes, je les entends toutes distinctement
Les
dix mille bruits se sont tus, cette nuit d’automne est tranquille
Le
bananier seul se réjouit, l’homme seul s’attriste
Je
préférerai que le vent d’ouest cesse et que la pluie cesse aussi
Traduit
par Cheng Wing fun et Hervé Collet
Le poème français
On
pourrait surnommer Guillaume Apollinaire "le poète de l’automne".
Dans
Signe, il déclare être soumis au signe de cette saison :
Mon
Automne éternelle ô ma saison mentale
Dans
Automne malade il écrit :
Et
que j’aime ô saison que j’aime tes rumeurs
Les
fruits tombant sans qu’on les cueille
Le
vent et la forêt qui pleurent
Toutes
leurs larmes en automne feuille à feuille.
Aujourd’hui pour illustrer l'automne, j’ai choisi Les colchiques un poème très connu qui contient dans ses vers 10 et 11 une petite
énigme mythico-littéraire :
Les colchiques
Le pré est vénéneux mais joli en automne
Les vaches y paissant
Lentement s'empoisonnent
Le colchique couleur de cerne et de lilas
Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-la
Violâtres comme leur cerne et comme cet automne
Et ma vie pour tes yeux lentement s'empoisonne
Les enfants de l'école viennent avec fracas
Vêtus de hoquetons et jouant de l'harmonica
Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mères
Filles de leurs filles et sont couleur de tes paupières
Qui battent comme les fleurs battent au vent dément
Le gardien du troupeau chante tout doucement
Tandis que lentes et meuglant les vaches abandonnent
Pour toujours ce grand pré mal fleuri par l'automne
Guillaume Apollinaire « Alcools » 1913
Les vaches y paissant
Lentement s'empoisonnent
Le colchique couleur de cerne et de lilas
Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-la
Violâtres comme leur cerne et comme cet automne
Et ma vie pour tes yeux lentement s'empoisonne
Les enfants de l'école viennent avec fracas
Vêtus de hoquetons et jouant de l'harmonica
Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mères
Filles de leurs filles et sont couleur de tes paupières
Qui battent comme les fleurs battent au vent dément
Le gardien du troupeau chante tout doucement
Tandis que lentes et meuglant les vaches abandonnent
Pour toujours ce grand pré mal fleuri par l'automne
Guillaume Apollinaire « Alcools » 1913
Apollinaire
déclare que les colchiques sont comme des « mères filles de leurs filles ».
Que signifie cette expression ? S’agit-il d’une licence poétique ? Ou
peut-on l’expliquer par des considérations botaniques, historiques, mystiques ou
mythologiques. Si oui ces explications renforcent-elles l’émotion esthétique
que nous ressentons en lisant ce poème ?
Je vous propose d'aborder ces questions dans un prochain article.
Jean-Louis
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