
Gustave Moreau, Oedipe et le Sphinx
La question était donc : « Pourquoi les rois de Thèbes portent un nom signifiant qu’ils ont du mal à marcher ou encore quel rapport y a-t-il entre la boiterie et la sexualité ? »
Les mythes ont pour fonction d’expliquer les phénomènes, souvent la création du monde, la naissance de l’Homme ou des animaux. Dans de nombreux mythes, l’Homme, les animaux, les monstres naissent de la terre comme les végétaux. Le mythe d’Œdipe contient encore des éléments de ces anciens mythes : les hommes naissent de la terre, le Sphinx, monstre chtonien, est né de la terre (Dans le tableau de Gustave Moreau, le Sphinx est un bien joli monstre. Ne trouvez vous pas ?). Mais voilà, les hommes nés de la terre s’entretuent et Œdipe tue le Sphinx. Le mythe d’Œdipe nous permet de passer d’un modèle végétal où les hommes naissent de la terre à un modèle où les hommes naissent de l’union de l’homme et de la femme.
Mais ce n’est pas si simple de passer d’un modèle à l’autre. Au moins deux éléments le montrent.
Tout d’abord, les hommes ont du mal à marcher. Ils restent attachés à la terre. Leurs pieds conservent encore quelque chose de la racine. Lévi-Strauss nous dit que l’on rencontre cette caractéristique dans de nombreux mythes.
Ensuite les relations au sein de la famille ne sont pas encore équilibrées, c’est le moins que l’on puisse dire. Soit il y a défaut d’attachement : c’est Œdipe qui tue son père Laïos, c’est Etéocle qui tue son frère Polynice (Etéocle et Polynice sont les deux fils d’Œdipe). Soit il y a excès d’attachement : c’est l’inceste entre Œdipe et sa mère, Jocaste, ou encore c’est Antigone, la fille d’Œdipe, qui enterre son frère Polynice, malgré l’interdiction du nouveau roi, Créon. Antigone, un modèle de piété filiale. Elle accompagnera Œdipe sur les chemins du monde lorsque celui-ci se crèvera les yeux après avoir appris qu’il avait épousé sa mère.
Voilà, c’était le premier cadeau : la réponse à la devinette. Je ne sais pas, chère Nicole, si elle recoupe l’explication que tu as trouvée. Je ne sais pas non plus quel crédit on peut accorder à cette lecture. Elle m’a permis, en tout cas, de retrouver des héros dont j’ai entendu parler depuis les bancs de l’école : Œdipe, Laïos, Jocaste, Antigone…
L’histoire de ces rois boiteux, m’a fait penser à une chanson de Georges Brassens : « le roi boiteux ». Ecoutez bien cette chanson : c’est un modèle d’impertinence vis-à-vis des courtisans de toutes sortes. (Malheureusement, je n’ai pas pu trouver de vidéo de Georges Brassens. J’ai choisi une vidéo qui se rapproche le plus de l’original.) Je l’ai fait écouter à mon professeur de guitare qui m’a fait remarquer le rythme ternaire évoquant la claudication.
Et comme Chinafi ne recule devant rien, bientôt un troisième cadeau qui nous permettra de découvrir d’autres aspects méconnus de légendes bien connues, par exemple découvrir quels rapports existent entre la légende chinoise du Bouvier et de la Tisserande et le Lac des Cygnes.
Jean-Louis